Rapport Sur La Détermination de La Loi Applicable Aux Actifs Inscrits en Registres Distribués

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RAPPORT SUR LA

DÉTERMINATION DE LA LOI
APPLICABLE AUX ACTIFS
INSCRITS EN REGISTRES
DISTRIBUÉS
du Haut Comité Juridique
de la Place Financière de Paris

31 mai 2024

9 rue de Valois 75001 Paris - Tél.: 33 (0)1 42 92 20 00 - [email protected] - www.hcjp.fr


Rapport sur la détermina1on de la loi applicable aux ac1fs inscrits en registres distribués

Table des matières


CONTEXTE ET OBJET DU RAPPORT .............................................................................................. 2
I. LES RESERVES RELATIVES A UNE QUALIFICATION INDIFFERENCIEE DES ACTIFS INSCRITS EN
REGISTRES DISTRIBUES. .............................................................................................................. 5
1.1. LE CHOIX D’UNE QUALIFICATION DIFFERENCIEE DES TITRES FINANCIERS ET DES AUTRES ACTIFS EN DROIT
SUBSTANTIEL. ...................................................................................................................... 6
1.2. LA NECESSITE D’UNE APPROCHE DISSOCIEE DES TITRES FINANCIERS ET DES AUTRES ACTIFS EN DROIT
INTERNATIONAL PRIVE. ........................................................................................................... 7
1.3. OBSERVATIONS SUR L’APPROCHE INDIFFERENCIEE PROPOSEE DANS LES PRINCIPES UNIDROIT. ...............8
II. DETERMINATION DU DROIT APPLICABLE AUX TITRES FINANCIERS INSCRITS EN REGISTRES
DISTRIBUES. ...............................................................................................................................11
2.1. LES REGLES DE CONFLIT EN MATIERE DE TITRES FINANCIERS INSCRITS EN COMPTE. ........................... 11
2.1.1. Droit posi,f. .................................................................................................... 12
2.1.2. Evolu,ons envisagées. ..................................................................................... 14
2.2. ADAPTATION DU CRITERE DE RATTACHEMENT POUR LES TITRES FINANCIERS INSCRITS EN REGISTRES
DISTRIBUES. ...................................................................................................................... 14
2.2.1. Nécessité de différencier les ,tres nomina,fs et les ,tres soumis au régime pilote. 15
2.2.2. Ra=achement des ,tres nomina,fs à la loi de l’éme=eur. .................................... 16
2.2.3. Détermina,on du ra=achement pour les ,tres soumis au régime pilote : Lieu de
situa,on de l’infrastructure d’enregistrement - SR ou SNR DLT. ....................................... 17
2.3. PORTEE DU RATTACHEMENT – INCLUSION DES QUESTIONS RELATIVES A LA CONSTITUTION ET A
L’OPPOSABILITE DES SURETES CONSTITUEES. ................................................................................. 20

III. DETERMINATION DU DROIT APPLICABLE AUX AUTRES ACTIFS INSCRITS EN REGISTRES


DISTRIBUES. ...............................................................................................................................21
3.1. DELIMITATION DE LA CATEGORIE DE RATTACHEMENT. ............................................................ 23
3.1.1. Ac,fs exclus. ................................................................................................... 23
3.1.2. Données générales sur la qualifica,on des « crypto-ac,fs ». ................................ 25
3.1.3. Alterna,ves et enjeux méthodologiques. ........................................................... 29
3.2. DETERMINATION DU RATTACHEMENT. ............................................................................. 33
3.2.1. Ra=achements exclus. ..................................................................................... 33
3.2.2. Ra=achements considérés : loi de l’éme=eur et loi du conservateur. ..................... 37
3.3. PORTEE DU RATTACHEMENT : ....................................................................................... 41
3.3.1. Ar,cula,on avec la loi applicable au rapport de conserva,on.............................. 42
3.3.2. La ques,on de la cons,tu,on et de l’opposabilité des sûretés. ............................. 42
3.3.3. Les règles d’ordre public monétaire pour les stablecoins. ..................................... 45
ANNEXE I : COMPOSITION DU GROUPE DE TRAVAIL ...................................................................47

1
Contexte et objet du rapport

A l’occasion de l’adapta1on du droit français à l’entrée en vigueur d’un cadre européen concernant
les technologies de registres distribués1, l’AMF a sollicité le Haut Comité Juridique de la Place
Financière de Paris (HCJP) aux fins de l’élabora1on d’un rapport sur l’état des solu1ons en droit
interna1onal privé français aux conflits de lois rela1fs aux effets patrimoniaux des ac1fs inscrits sur
un registre distribué.
La réflexion à mener du point de vue du droit français s’inscrit dans un contexte en rapide évolu1on.
Plusieurs Etats se sont dotés d’un cadre de droit substan1el et de règles de conflits spécifiques dont,
en par1culier, les Etats-Unis, la Suisse, l’Allemagne, Monaco ou encore le Liechtenstein, concernant
certains types d’ac1fs inscrits dans des registres « distribués » ou « décentralisés »2.
Un projet de Principes sur les ac)fs digitaux et le droit privé a été adopté en mai 2023 par l’Assemblée
générale d’Unidroit3, composé de principes de droit matériel et d’une règle de conflit spécifique (ci-
après, les « Principes Unidroit »). Les travaux réalisés par Unidroit ont été envisagés comme un
possible point de départ aux fins de l’élabora1on d’une Conven1on interna1onale en la ma1ère par
la Conférence de droit interna1onal de la Haye, dans le cadre d’une « ini1a1ve conjointe » entre les
deux organisa1ons4. CeXe ini1a1ve conjointe a cependant été interrompue compte tenu des
réserves émises par la France sur ses prémisses et partagées par d’autres membres du HCCH5.
En France, l’entrée en vigueur du règlement dit « régime pilote »6 a entraîné diverses adapta1ons
au droit des 1tres7, tandis que l’adop1on du règlement « MiCA »8 a récemment fait l’objet d’autres
travaux de place. Le présent rapport s’est efforcé d’intégrer ce cadre évolu1f à sa présenta1on et à
ses proposi1ons, en dis1nguant bien les éléments de lege lata et de lege ferenda, en par1culier

1 V. la défini+on donnée par l’ar+cle 2 du RÈGLEMENT (UE) 2022/858 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 30 mai 2022 sur
un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, et modifiant les règlements
(UE) no 600/2014 et (UE) no 909/2014 et la direc+ve 2014/65/UE : « Aux fins du présent règlement, on entend par: 1) «technologie
des registres distribués» ou «DLT», une technologie qui permet l’exploita+on et l’u+lisa+on de registres distribués ; 2) «registre
distribué», un répertoire d’informa+ons qui conserve un enregistrement des transac+ons et qui est partagé et synchronisé au sein d’un
ensemble de nœuds de réseau DLT, au moyen d’un mécanisme de consensus », reprise à l’ar+cle 3, 1) et 2) du RÈGLEMENT (UE)
2023/1114 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-ac+fs, et modifiant les règlements
(UE) no 1093/2010 et (UE) no 1095/2010 et les direc+ves 2013/36/UE et (UE) 2019/1937.
2 Sur l’adop+on de la no+on européenne de technologie des registres distribués dans le présent rapport, v. infra, les explica+ons sur

l’expression « ac+fs inscrits en registres distribués ».


3 Governing Council, Item n° 4 on the agenda : Adop+on of Draf UNIDROIT Instruments (C) Principles on Digital Assets and Private

Law : UNIDROIT 2023, C.D. (102) 6, April 2023, 102nd session, Rome, 10-12 May 2023 (ci-après, les Principes UNIDROIT 2023 - C.D.
(102) 6).
4 CGAP, Proposal for Joint Work: HCCH-UNIDROIT Project on Law Applicable to Cross-Border Holdings and Transfers of Digital Assets

and Tokens, Prel. Doc. No 3C of January 2023: hnps://assets.hcch.net/docs/a91fd233-acf7-4c42-9aad-a426c4565068.pdf, spec. pts.


17 et 18, p. 6.
5 PB, HCCH-UNIDROIT Digital Assets and Tokens Joint Project: Report, MARCH 2024 PREL. DOC. NO 3, p. 7, n° 28; CGAP Conclusions &

Decisions (C&D), March 2024, p. 2, n° 8.


6 RÈGLEMENT (UE) 2022/858 préc.
7 Opérées par la Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses disposi+ons d'adapta+on au droit de l'Union européenne dans les

domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture et le Décret n° 2023-421 du 31 mai 2023 portant
adapta+on du droit des +tres au règlement européen dit « régime pilote ».
8 RÈGLEMENT (UE) 2023/1114, préc.

2
concernant les pistes d’adapta1on du droit français au règlement MiCA préconisées dans un rapport
du HCJP publié au cours de son élabora1on9.
C’est dans ce cadre qu’il a été demandé aux soussignés de cons1tuer un groupe de travail pour
iden1fier les éventuelles lacunes ou insuffisances des règles de conflits de lois françaises, et réfléchir
aux raXachements per1nents aux fins de l’élabora1on d’éventuelles règles de conflit par1culières.
Le groupe de travail10 s’est réuni à six reprises, entre le mois de novembre 2023 et le mois de mai
2024, pour arrêter des choix de méthode, puis examiner la détermina1on du raXachement per1nent
pour les 1tres financiers inscrits dans une technologie de registre distribué, avant d’envisager la
qualifica1on et les raXachements possibles pour les ac1fs autres que les 1tres financiers.
Le présent rapport porte ainsi sur la détermina1on de la loi applicable aux effets patrimoniaux des
ac1fs inscrits en registres distribués.

Ainsi formulé, l’objet de ce rapport appelle plusieurs explica1ons.


L’expression « ac1fs inscrits en registres distribués » suppose deux précisions :
- Le terme ac,f inscrit sans autre qualifica1f permet d’englober tant les instruments de
financement ou d’inves1ssement déjà connus suscep1bles d’être inscrits en registres
distribués, tels les 1tres financiers11, que de nouveaux types d’ac1fs sans préjuger de leur
qualifica1on ou de leur classifica1on. Un certain nombre d’instruments ont toutefois été
exclus du champ des proposi1ons du présent rapport compte tenu de la réflexion spécifique
qu’ils appellent12. Plus généralement, le terme « ac1f » suppose la patrimonialité de
l’inscrip1on ce dont il résulte une double exclusion : toute donnée « extrapatrimoniale » se
trouve exclue de la réflexion ; tout élément patrimonial insuscep1ble d’être transmis par
modifica1on de l’inscrip1on ne cons1tue pas un ac1f inscrit en tant que tel.
- La no1on de registre distribué ne renvoie à aucun texte ni aucune défini1on spécifique en
vigueur. Elle est toutefois plus proche de la no1on européenne de « technologie de registres
distribués »13 que de la no1on u1lisée en droit français de « disposi1f d’enregistrement
électronique partagé » à laquelle il a été préconisé de subs1tuer la no1on européenne dans
le rapport déjà cité sur le règlement MiCA14. Elle souligne également la difficulté essen1elle
en termes de localisa1on cons1tuée par l’absence de tenue du registre sur un serveur
central.

Ainsi qu’il a été précisé en introduc1on, la réflexion du groupe de travail s’est limitée, en outre, à la
détermina1on de la loi applicable aux effets patrimoniaux des ac1fs, dont la délimita1on a été

9 Rapport sur le règlement MiCA du Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris 27 janvier 2024 : hnps://www.banque-

france.fr/fr/system/files/2024-03/Rapport_61_F.pdf.
10 V. la composi+on du groupe de travail, en Annexe au présent rapport.
11 Selon la nomenclature interne des instruments financiers qui résulte de l’ar+cle L.211-1 du Code monétaire et financier.
12 V. infra, 3.1.1.
13 V. note 1.
14 Rapport sur le règlement MiCA, préc., p. 14.

3
arrêtée15. La catégorie a été entendue comme incluant les principales ques1ons rela1ves à la
détermina1on des droits réels et de leurs modalités d’exercice et de transfert sur les ac1fs.
En relèvent en par1culier l’iden1fica1on, ou non, de l’ac1f comme bien16, la détermina1on des droits
dont il peut faire l’objet – propriété et démembrements – pour le 1tulaire et au bénéfice de 1ers,
les condi1ons d’exercice de ces droits, en par1culier par l’exercice d’une ac1on en revendica1on et
la protec1on du 1tulaire de bonne foi régulièrement inscrit, et les modalités et effets du transfert de
propriété – sous réserve des lois de police applicables en la ma1ère17. Par souci de cohérence, la
réflexion a été étendue à la cons,tu,on et à l’opposabilité des sûretés légales ou conven,onnelles.
L’inclusion des sûretés dans le champ de la réflexion s’est imposée essen1ellement dans un souci de
détermina1on de la portée des raXachements choisis.
A l’issue d’une réflexion méthodologique, le groupe de travail a choisi de traiter dis1nctement de la
détermina1on de la loi applicable aux 1tres financiers inscrits dans un registre distribué et aux autres
ac1fs inscrits en registres distribués18.
Au terme de ses travaux, il est apparu possible de déterminer la loi applicable aux 1tres financiers
inscrits en registres distribués (II) en opérant une dis1nc1on entre :
- Les )tres nomina)fs, non soumis au règlement régime pilote et inscrits dans un DLT, régis, en
applica1on des principes du droit interna1onal privé français, par la loi de l’émeXeur ;
- Les )tres soumis au régime pilote, enregistrés sur une infrastructure de marché DLT, et régis,
selon une règle de conflit spécifique, par la loi applicable à l’infrastructure de marché
réalisant le service de conserva1on soit, selon les cas, au système de règlement ou au
système de négocia1on et de règlement DLT.

Concernant les autres ac1fs inscrits en registres distribués (III), le groupe de travail a conclu à la
nécessité d’édicter une nouvelle règle de conflit spécifique, ar1culant sous forme hiérarchisée, des
raXachements objec1fs prenant en compte la diversité des crypto-ac1fs. Certains crypto-ac1fs ne
font pas l’objet d’une émission et le recours à un service de conserva1on n’est pas une nécessité.
Dans l’impossibilité d’ériger l’un ou l’autre de ces critères en raXachement unique, le groupe de
travail s’est unanimement accordé sur la per1nence de deux critères cons1tués par la loi de
l’émeXeur et celle du conservateur, complétés de manière très subsidiaire par un raXachement
fondé sur le lieu de résidence habituelle du détenteur.

15 Retenant en cela la méthode déjà suivie dans un précédent rapport, sollicité par la Direc+on générale du Trésor et de la poli+que
économique : Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, Prés. H. Synvet, n° 15, p.
6. V. En par+culier, la proposi+on d’introduire un ar+cle L.211-17 ayant voca+on à déterminer la loi applicable en présence d’un
intermédiaire et dont le domaine est précisé à l’alinéa second : « Sont soumis à la loi ainsi désignée, notamment, la détermina+on des
droits anachés à l’inscrip+on en compte, l’opposabilité de ces droits aux +ers, le régime de leur transmission, les condi+ons de la
revendica+on des +tres financiers, la cons+tu+on et les effets des garan+es conven+onnelles sur +tres financiers, les sûretés légales
suscep+bles de les grever, le conflit de droits concurrents portant sur les mêmes +tres financiers ». Comp. art. 2 de la Conven+on du 5
juillet 2006 sur la loi applicable à certains droits sur des +tres détenus auprès d'un intermédiaire.
16 Compte tenu, en par+culier, du développement des « Soulbounds tokens », également appelés “social, community and reputa+on

tokens”, dont la qualifica+on comme « ac+f » dans un sens patrimonial est inexacte compte tenu de l’impossibilité d’en disposer. V.
CGAP, Proposal for Joint Work: HCCH-UNIDROIT Project on Law Applicable to Cross-Border Holdings and Transfers of Digital Assets
and Tokens, préc., pts. 13-15.
17 An+cipant, par exemple, de futurs délais imposés au règlement des crypto-ac+fs transférés, par analogie avec le droit des +tres.
18 Il n’est pas rigoureux de parler d’emblée de « crypto-ac+fs », l’un des problèmes soulevés consistant précisément à préciser la

catégorie de ranachement. Du fait de sa coïncidence avec le règlement « MiCA », le terme crypto-ac+fs suggèrerait la nécessité
d’aligner le champ de la règle de conflit sur les ac+fs couverts par le règlement. Sur cene ques+on, infra, 3.1.3.
4
En revanche, le groupe ne s’est pas unanimement accordé sur l’ordre de ces critères. La majorité de
membres composant le groupe a souhaité émeXre comme proposi1on19 l’énoncé d’une règle
soumeXant les ac1fs inscrits en registres distribués autres que les 1tres financiers à la loi désignée
par :
- Un raXachement de principe fondé sur la conserva1on de l’instrument ;
- Un raXachement subsidiaire fondé sur l’émission à défaut de rapport de conserva1on ;
- Un raXachement de dernier rang fondé sur la résidence habituelle du détenteur.

Avant de rendre compte des analyses conduites sur ces deux ques1ons, il convient d’exposer les
raisons de ceXe approche dissociée. Celle-ci repose sur les réserves émises à l’encontre d’une
qualifica1on trop large appliquée aux ac1fs inscrits en registres distribués, qui conduirait à privilégier
en droit interna1onal privé une approche fondée sur la forme d’ac1fs de nature profondément
différente en droit substan1el (I).

I. Les réserves rela6ves à une qualifica6on indifférenciée des ac6fs


inscrits en registres distribués.

Dans une perspec1ve française et européenne, la réflexion de droit interna1onal privé rela1ve à
l’introduc1on de règles de conflits de lois doit être inscrite dans le contexte d’élabora1on du droit
substan1el.
Le droit français et le droit de l’Union européenne adoptent ainsi chacun une approche dissociée
de la qualificaUon comme de la règlementaUon des ac1fs inscrits en registres distribués selon qu’il
s’agit de 1tres financiers ou d’autres types d’ac1fs20 (1.1.). Cet état du droit posi1f jus1fie d’explorer
une approche dissociée de ces différents ac1fs en droit interna1onal privé (1.2.). CeXe démarche
est confortée par les réserves que l’on peut formuler face aux prémisses des Principes Unidroit qui
reposent sur une qualifica1on unique et indifférenciée de l’ensemble des « ac1fs numériques »21
(1.3.).

19 V. infra, 3.2.2. ii), la proposi+on émise et l’alterna+ve discutée par une par+e des membres du groupe de travail.
20 Aux fins d’une réflexion de droit interna+onal privé, cet état du droit posi+f n’a pas été ques+onné par le groupe du travail, dont les
discussions se sont simplement nourries du dernier état des réflexions rela+ves aux difficultés de dis+nc+on entre les instruments
financiers et les crypto-ac+fs. En dernier lieu, ESMA, Consulta+on paper On the draf Guidelines on the condi+ons and criteria for the
qualifica+on of crypto-assets as financial instruments, 29 January 2024 ESMA75-453128700-52.
21 Traduc+on linérale de digital assets qui ne coïncide pas avec le concept français d’ac+fs numériques qui va être rappelé

5
1.1. Le choix d’une qualifica:on différenciée des :tres financiers et des autres
ac:fs en droit substan:el.

En droit français, l’ordonnance dite « blockchain »22 - précisée par son décret d’applica1on23
également applicable à l’émission et à la cession de mini-bons24 -, a posé un principe d’équivalence
des inscrip1ons au sein d’un disposi1f d’enregistrement électronique partagé (DEEP) avec les
inscrip1ons en compte et de leur portée25, pour les 1tres financiers non cotés26. La loi du 9 mars
202327, est ensuite venue étendre la possibilité d’inscrip1on dans un DEEP des 1tres cotés, en
applica1on du Règlement régime pilote. Ce disposi1f coexiste avec celui de la Loi Pacte28,
reconnaissant la catégorie des ac1fs numériques29 et posant un principe de dis1nc1on entre ceux-
ci et les 1tres financiers et bons de caisse, et décomposée en deux catégories :
- La première catégorie est cons1tuée par des jetons, qualifiés de biens incorporels30 aux fins
de l’applica1on du statut d’émeXeurs de jetons et, par renvoi, de celui de prestataire de
services sur ac1fs numériques (PSAN) ; et
- La seconde catégorie est cons1tuée par des ac1fs numériques, représentant une valeur, et
répondant à une fonc1on « d’échange » apparentée à celle de la monnaie, mais qui s’en
dis1ngue formellement aux termes de l’ar1cle L.54-10-1, 2° du code monétaire et financier.
Cet état du droit posi1f marque le choix d’un dualisme de qualifica1ons et de régimes applicables.
Si la ligne de partage est appelée à évoluer conformément au droit de l’Union31, un dualisme de
qualifica1ons et de régimes en découle nécessairement et va ainsi perdurer.
En droit de l’Union européenne, la dissocia1on du traitement des instruments financiers et des
autres ac1fs inscrits en registre distribué résulte des règlements régime pilote et MiCA. Ainsi, dans
une perspec1ve de régula1on, contrairement à la démarche du régulateur américain consistant à
étendre aux ac1fs inscrits en registres distribués les contraintes du droit fédéral des valeurs
mobilières32, un cadre spécifique a été élaboré pour les marchés de crypto-ac1fs, dont sont
formellement exclus les instruments financiers.

22 Ordonnance n° 2017-1674 du 8 décembre 2017 rela+ve à l'u+lisa+on d'un disposi+f d'enregistrement électronique partagé pour la
représenta+on et la transmission de +tres financiers
23 Décret n° 2018-1226 du 24 décembre 2018 rela+f à l'u+lisa+on d'un disposi+f d'enregistrement électronique partagé pour la

représenta+on et la transmission de +tres financiers et pour l'émission et la cession de minibons


24 Le régime ins+tué par l’Ordonnance n° 2016-520 du 28 avril 2016 rela+ve aux bons de caisse a été supprimé par l’ordonnance n°

2021-1735 du 22 décembre 2021 modernisant le cadre rela+f au financement par+cipa+f.


25 L.211-3, alinéa 2 du Code monétaire et financier.
26 Par renvoi ini+al aux seules disposi+ons de l’ar+cle L.211-7, alinéa 2, visant les +tres non admis aux opéra+ons d’un dépositaire

central.
27 LOI n° 2023-171 du 9 mars 2023, préc.
28 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 rela+ve à la croissance et la transforma+on des entreprises
29 L.54-10-1 du Code monétaire et financier.
30 L.552-1 du Code monétaire et financier.
31 Sur l’ar+cula+on des concepts d’ac+fs numériques et de crypto-ac+fs, v. les analyses et proposi+ons du RAPPORT SUR LE RÈGLEMENT

MiCA, préc., pp. 14-16. V. infra, 3.1.2.


32 Selon la posi+on adoptée par la SEC, faisant applica+on du « Howey test » aux fins de la qualifica+on de securi+es d’après la

législa+on fédérale, établie par la Cour Suprême dans SEC v. W. J. Howey Co. 328 U.S. 293 (1946) : U.S. Securi+es and Exchange
Commission (SEC), « Report of Inves+ga+on Pursuant to Sec+on 21(a) of the Securi+es Exchange Act of 1934: The DAO », n° 81207
(2017), accessible à l'adresse suivante : hnps://www.sec.gov/li+ga+on/investreport/34-81207.pdf (consulté en dernier lieu le
28/03/2024).
6
Le régime pilote, ayant entraîné l’adapta1on du droit français opérée par la loi déjà citée du 9 mars
2023, a étendu les modalités d’inscrip1on des instruments financiers en registre distribué dans le
cadre d’opéra1ons conclues sur infrastructures DLT. Par son objet, il concerne l’admission à la
négocia1on dans des infrastructures DLT des seuls instruments financiers, au sens de l’ar1cle 4,
paragraphe 1, point 15), de la direc1ve 2014/65/UE (par renvoi de l’ar1cle 2.12) du règlement), qui
reçoivent alors la qualifica1on d’« instruments financiers DLT » (art. 2.11 du règlement).
Au sens de son ar1cle premier §1, le règlement MiCA a pour objet d’établir « des exigences uniformes
pour l’offre au public et l’admission à la négocia)on sur une plate-forme de négocia)on de crypto-
ac)fs autres que les jetons se référant à un ou des ac)fs et les jetons de monnaie électronique, de
jetons se référant à un ou des ac)fs et de jetons de monnaie électronique, ainsi que des exigences
applicables aux prestataires de services sur crypto-ac)fs ». Ce texte est ainsi d’abord un texte de
régula1on par son objet – regulatory law selon l’accep1on des Principes Unidroit exposée ci-après33
– établissant des exigences rela1ves à des statuts professionnels, à la réalisa1on de certaines
opéra1ons et à la sanc1on des abus de marché. Il n’en repose pas moins sur certaines défini1ons
des éléments de droit substan1el permeXant d’iden1fier les crypto-ac1fs, et une exclusion hors de
son champ d’applica1on des crypto-ac1fs répondant à la qualifica1on d’instruments financiers34.

1.2. La nécessité d’une approche dissociée des :tres financiers et des autres
ac:fs en droit interna:onal privé.

CeXe approche française et européenne se dis1ngue ainsi en par1culier de celle suivie par les
Principes Unidroit, selon une double inspira1on :
- Sur le terrain substanUel, les Principes souscrivent à une approche des instruments fondée
sur leur forme, fortement inspirée du droit uniforme américain35, soumeXant
indis1nctement tous types de valeurs à un corpus de règles matérielles, par référence au
concept de digital asset. L’unité de la catégorie provient de la possibilité d’exercice d’un
contrôle36 sur le droit ou la valeur renfermée dans l’inscrip1on électronique, le critère du
contrôle reprenant lui-même au Principe 6 les principaux éléments de défini1on qu’il a reçus
dans les récentes modifica1ons opérées du Uniform Commercial Code37 ;
- Sur le terrain de la règle de conflit, le Principe 5 suit une approche délocalisée de
l’instrument. Dans les pas des premières réflexions académiques sur le sujet, certains
travaux de place38 ont mis en évidence la difficulté générale de localisa)on des ac1fs inscrits
sur un registre distribué et l’intérêt d’y apporter une réponse par des règles transna1onales.
CeXe approche emporte une double conséquence :

33 V. I.3.
34 V. Art. 2.4, a).
35 Ar+cle 12 du Uniform Commercial Code consacré aux Controllable Electronic Records.
36 Principe 2(2): ‘Digital asset’ means an electronic record which is capable of being subject to control’.
37 Sec+on 12-105.
38 Financial Markets Law Comminee, Distributed Ledger Technology and Governing Law : Issues of Legal Uncertainty, March 2018 (ci-

après, “FMLC”, March 2018).


7
• Les raXachements proposés, conçus en cascade – waterfall structure –, donnent
priorité à la loi d’autonomie en érigeant en premier raXachement la loi désignée
dans l’ac1f et en deuxième raXachement, celle désignée dans le « système ». Le
recours à un raXachement objec1f fondé sur la loi de l’émeXeur n’intervient que de
manière très subsidiaire ;
• La portée du raXachement est plus étendue que les ques1ons de droit matériel
traitées par les autres Principes. Au sens de la note explica1ve, la loi désignée selon
les raXachements du Principe 5 couvre nombre de ques1ons de fond formellement
exclues du champ d’applica1on des Principes39, en par1culier toutes celles écartées
par son principe 3 concernant la qualifica1on des ac1fs, les droits dont ils peuvent
faire l’objet ainsi que les modalités de transfert desdits droits.
La détermina1on d’une catégorie de raXachement indifférenciée comme celle d’ac1fs numériques,
telle que définie par les Principes Unidroit, conduit à soumeXre à une même règle de conflit tant les
crypto-ac1fs usuellement dis1ngués – crypto-monnaies, ac1fs se référant à d’autres ac1fs ou jetons
de monnaie électronique – que les 1tres financiers, ou encore les droits de propriété intellectuelle.
Or ces qualifica1ons n’induisent pas simplement des conséquences en termes de régula1on. Elles
ont également une dimension propre sur le terrain du droit privé.
La démarche de qualifica1on suivie par les Principes Unidroit conduit ainsi à méconnaître la
spécificité des 1tres financiers au sein des ac1fs inscrits en registres distribués et en décalage avec
le droit substan1el, privilégiant ainsi la forme de l’instrument sur la substance des droits qu’ils
renferment. Plus spécifiquement, en droit interna1onal privé, les 1tres financiers relèvent déjà d’un
cadre en ma1ère de conflits de lois40, dont l’adéqua1on et les évolu1ons possibles par voie
d’adapta1on peuvent être envisagées dis1nctement.

En outre, la qualifica1on de digital asset se concentre sur l’enregistrement lui-même et conduit ainsi
à considérer nombre d’instruments dématérialisés de longue date en France, comme les 1tres
financiers, comme des ac1fs liés – linked assets – au sens du Principe 4. Ce principe soumet à une
loi différente de la loi d’autonomie deux ques1ons essen1elles rela1ves à l’existence du lien entre
l’enregistrement et l’ac1f qu’il représente, ainsi que la portée en termes de transfert de propriété de
l’ac1f représenté d’un transfert de l’enregistrement. Ces ques1ons sont déterminées par la loi
applicable à l’ac1f représenté.
CeXe dissocia1on entre l’enregistrement électronique et l’ac1f représenté ne coïncide pas
conceptuellement avec la dis1nc1on de l’instrumentum et du nego1um et postule une autonomie
patrimoniale de la représenta1on électronique elle-même, qui est fort éloignée de l’analyse
tradi1onnelle des 1tres négociables en droit français.

1.3. Observa:ons sur l’approche indifférenciée proposée dans les Principes


Unidroit.

39 Pt. 5.2, de la note explica+ve.


40 V. infra, 2.1.
8
Le choix opéré par les Principes Unidroit en faveur d’un raXachement de principe à la loi
d’autonomie est cohérent avec la prémisse d’une qualifica1on fondée sur la forme de l’instrument.
La diversité des instruments est telle que des éléments objec1fs communs de raXachement ne
peuvent en effet être déterminés pour l’ensemble des instruments visés.
En termes de méthode, c’est donc l’adop1on d’une qualifica1on et d’un régime unifié pour
l’ensemble des ac1fs inscrits en registres distribués qui jus1fie le recours à la loi d’autonomie. CeXe
approche repose sur différentes jus1fica1ons, exposées dans leur commentaire, dont les principales
appellent des réserves :
- La loi d’autonomie comme raXachement de principe permet la soumission de tous les ac1fs
numériques à un raXachement unique, venant ainsi conforter sur le terrain des conflits de
lois le principe de neutralité technologique que permet une approche indifférenciée de tous
les ac1fs numériques41.
A l’examen, cet argument est réversible. La créa1on de règles originales, tant de fond qu’en ma1ère
de conflits de lois entérine une singularité de certains supports et procédés numériques. Elle modifie
l’approche d’instruments d’inves1ssements usuels, tels les instruments financiers, qui se trouvent
assimilés pour une large part de leur régime à d’autres instruments fort différents.
A cet égard, l’observa1on évidente selon laquelle le droit interna1onal privé se concentre sur les
ques1ons de droit privé ne suffit pas à légi1mer absolument la généralisa1on d’un raisonnement en
termes de qualifica1on exclusivement fondé sur la forme, dès lors que des ac1fs et instruments
présentant la même forme peuvent faire l’objet d’une analyse en droit substan1el profondément
différente. En droit privé, des dis1nc1ons sont naturellement à faire dans le régime juridique
applicable en fonc1on de la qualité des par1es, de la nature de l’engagement ou des modalités de
protec1on de leurs droits42. Selon une approche fonc1onnelle, les règles de conflit de lois doivent
en rendre compte. En droit privé, le régime des instruments négociables a été forgé d'après leur
usage, afin d'en favoriser le développement. Et c'est compte tenu de leurs caractéris1ques comme
instruments négociables qu'un certain type de règles de conflits peut leur être appliqués. La forme
d’un instrument n’est qu’une manière d’en aborder la qualifica1on, suscep1ble d’être combinée avec
d’autres considéra1ons43. C'est également compte tenu de trop fortes divergences d’analyse faites
sur le terrain substan1el que les qualifica1ons et règles de conflits peuvent ou non être adaptées et
généralisées44.
- La loi d’autonomie serait intrinsèquement adaptée à la détermina1on de la loi applicable
pour les ac)fs numériques45, compte tenu de leur absence de situs et de l’incita1on ainsi
faite aux opérateurs de déterminer eux-mêmes la loi applicable.

41 V. Pt. 0.5 et s., de la note explica+ve.


42 En songeant en par+culier au régime des +tres négociables.
43 Selon une simple analogie, le développement des +tres papiers dans le commerce interna+onal n’a pas historiquement conduit à

l’érec+on en droit interna+onal privé d’une catégorie des « ac+fs papiers » soumis à un ranachement unique. Il ne s’agit bien que
d’une analogie une fois observé que le papier se prête à l’exercice de préroga+ves matériellement plus étendues qu’un enregistrement
électronique.
44 L’exemple le plus net est donné par l’état des ra+fica+ons de la Conven+on du 5 juillet 2006 sur la loi applicable à certains droits sur

des +tres détenus auprès d'un intermédiaire, qui s’explique par les divergences d’analyses rela+ves à l’admission du concept de +tre
intermédié. Adaptées aux systèmes juridiques admenant le concept de +tres intermédiés, les règles de conflit qu’elles renferment ont
paru inadéquates dans les systèmes en récusant la per+nence.
45 Pt. 5.4, de la note explica+ve.

9
L’analyse peut être doublement discutée. En pra1que d’abord, la loi d’autonomie n’est pas
nécessairement le raXachement le plus adapté en termes de sécurité juridique et de prévisibilité.
Elle peut, abstraitement, conduire à une succession de changements dans la loi applicable à un
même ac1f sur la base de la seule décision unilatérale du disposant et ainsi susciter des complexités
pour en déterminer la portée, tout spécialement en termes d’opposabilité à l’égard des 1ers46.
Sociologiquement, ensuite, l’affirma1on de son effet d’incita1on suppose que la loi d’autonomie
puisse efficacement correspondre au contexte de sa mise en œuvre et aux aXentes des acteurs de
la crypto-économie. Ce n’est pour l’instant qu’hypothé1que. La sensibilité des opérateurs aux
différences de tradi1on juridique en ma1ère de droit des biens n’est pas encore avérée et l’effet
d’incita1on de la loi d’autonomie n’est qu’espéré47.
A défaut de tout élément empirique démontrant une quelconque recherche d’autonomie par les
opérateurs sur le terrain des condi1ons et effets patrimoniaux des ac1fs détenus, il paraît ainsi
largement hypothé1que que la loi d’autonomie réponde à un besoin ressen1 et compris par les
détenteurs d’ac1fs inscrits en registres distribués.
CeXe observa1on appelle une précision dans le contexte du règlement MiCA, dont les annexes
imposent la men1on, dans le Livre Blanc, de la loi applicable à l’offre et du droit applicable aux
crypto-ac1fs48. Une difficulté d’interpréta1on peut apparaître pour iden1fier dans ces exigences un
choix implicite en faveur de la loi d’autonomie. Il faut cependant souligner que dans le contexte de
MiCA, ces men1ons cons1tuent des exigences règlementaires aux fins de transparence sur les
condi1ons de l’offre de crypto-ac1fs. Le règlement MiCA étant un texte de régula1on, il n’a pas pour
objet l’introduc1on des règles de droit interna1onal privé. En l’état, la pra1que des opérateurs
procède d’une liberté de choix, fréquemment portée sur la loi de l’émeXeur, qui s’explique par
l’absence de toute règle de conflit de lois spécifique. On ne saurait donc absolument conclure du
règlement MiCA que la loi d’autonomie a été implicitement consacrée par une règle de conflit
cachée. Il n’est pas impossible d’admeXre qu’une loi éta1que re1enne de manière objec1ve dans
ses règles de conflits un raXachement, par exemple à la loi de l’émeXeur, pour iden1fier le droit
applicable aux ac1fs, sans que cela soit en contradic1on avec le règlement MiCA, qui n’est pas un
texte de droit interna1onal privé.
- La loi d’autonomie, limitée aux ques1ons de droit privé, main1ent intacte la sépara1on entre
les ques1ons de droit public – regulatory law – qui n’en relèvent pas, et les ques1ons de droit
privé rela1ves au statut réel, qui y sont soumises49.
La sépara1on ainsi affirmée entre les ques1ons de droit privé et de droit public paraît toutefois
schéma1que50. Si elle ne l’impose pas, elle n’exclut pas la recherche de prévisibilité sous l’angle de

46 V. infra, 3.2.1.
47 La note explica+ve des Principes avait elle-même souligné, lors de leur adop+on, la très faible expression pra+que, en l’état, de la
loi d’autonomie : « although many digital assets, or systems, currently do not include a specifica+on of applicable law, the rules in
Principle 5(1)(a) and Principle 5(1)(b) provide an incen+ve for such a specifica+on to be included » (pt. 5.5). En ce sens, les discussions
intervenues lors des travaux préparatoires : Study LXXXII – W.G.6 – Doc. 4, nov. 2022, spéc., n° 37, p. 8 et 41, p. 9
48 Le règlement MiCA inscrit parmi les éléments figurant au livre blanc la détermina+on de la loi applicable à l’offre et le droit applicable

aux crypto-ac+fs (respec+vement, pour les crypto-ac+fs autres que référant à des ac+fs ou jetons de monnaie électronique, Annexe I,
E, §19 et Annexe I, G, §10 ; pour les crypto-ac+fs se référant à un ou des ac+fs, Annexe II, C, §15 et Annexe II, D, §17 et pour les jetons
de monnaie électronique, Annexe III, C, §4 et Annexe III, D, §8).
49 V. Pt. 0.9 et, sous le principe 1, pt. 1.1, de la note explica+ve.
50 En s’en tenant à des observa+ons générales, on peut souligner, d’une part, les règles de droit public fixant des statuts professionnels

ont aussi en vue la protec+on de certains intérêts catégoriels, dont en par+culier la protec+on des inves+sseurs, protec+on tenant
compte des droits et préroga+ves de droit privé reconnus à ces derniers ; d’autre part, les règles de droit privé ne sont pas, dans le
10
la loi applicable par une éventuelle convergence des raXachements, le cas échéant. En outre, la mise
en œuvre de la loi d’autonomie dans un contexte désormais largement réglementé soulève nombre
d’incer1tudes pra1ques51.
Les avantages offerts par la loi d’autonomie ne sont ainsi pas indiscutables et ne parviennent pas à
jus1fier la nécessité d’une approche indifférenciée des ac1fs.
Ces observa1ons ont ainsi conduit le groupe à entreprendre une réflexion spécifique rela1ve aux
1tres financiers, en raison de l’extension du support d’inscrip1on aux registres distribués.

II. Détermina6on du droit applicable aux 6tres financiers inscrits en


registres distribués52.

Compte tenu du double disposi1f déjà rappelé, dont font l’objet les 1tres inscrits en registres
distribués sur le terrain substan1el, une réflexion spécifique doit y être consacrée aux fins de
détermina1on d’un critère raXachement. CeXe réflexion doit avoir pour point de départ les règles
de conflits en ma1ère de 1tres financiers inscrits en compte (2.1.) pour en déterminer par analogie
la per1nence et les nécessités d’adapta1on (2.2.). La portée des raXachements peut enfin être
précisée pour inclure la cons1tu1on et l’opposabilité des sûretés dans le champ de la loi désignée
(2.3.).

2.1. Les règles de conflit en ma:ère de :tres financiers inscrits en compte.

Les solu1ons aux conflits lois rela1fs aux 1tres inscrits en compte reposent sur une série de règles
et principes d’inégale portée, qui explique la diversité des présenta1ons qui en sont habituellement
proposées en doctrine. Elles paraissent toutefois marquées par une rela1ve stabilité, compte tenu
de la présenta1on qui en avait été faite dans un rapport il y a une quinzaine d’années53,
régulièrement évoqué par le groupe de travail au cours de ses discussions.

champ du droit des biens en par+culier, dépourvues de toute prise en compte de ques+ons d’intérêt général. Aux condi+ons de
protec+on du droit de propriété s’ajoute la détermina+on essen+elle des choses dans et hors du commerce (v. art. 1128, anc. C.civ.).
51 V. infra, 3.2.1.
52 Cene périphrase a été privilégiée pour ne soulever aucune ambiguïté, en dépit des autres appella+ons envisageables, comme celle

de « +tre financier numérique », ou « digital », ou, encore « tokénisé » : v. le Rapport sur les +tres financiers digitaux ("Security
Tokens"), du 27 novembre 2020 et le Rapport sur la réforme des +tres financiers numériques, du 20 mai 2022, du Haut Comité Juridique
de la Place Financière de Paris.
53 Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, Prés. H. Synvet.

11
A cet égard, le rappel ainsi réalisé souligne la nécessaire con1nuité des réflexions à mener en droit
des 1tres, en exposant les principes et règles qui forment le droit posi1f (2.1.1.) et en évoquant les
pistes d’évolu1ons déjà envisagées (2.1.2.).

2.1.1. Droit posiUf.


Le droit interna1onal des 1tres financiers repose sur la combinaison de plusieurs raXachements dont
l’ar1cula1on demeure difficile à systéma1ser, compte tenu de leur portée et de leurs sources,
autrement qu’en suivant la chronologie des opéra1ons rela1ves à la créa1on et à la circula1on du
1tre.
1° Les principes généraux de délimita,on de la loi de l’éme=eur lui conférant compétence
rela1vement aux condi1ons d’émission, à la validité et à la forme – par exemple nomina1ve ou au
porteur – des 1tres émis, aux rela1ons entre l’en1té émeXrice et les détenteurs, ainsi qu’aux
condi1ons de fond du transfert de propriété et d’opposabilité à ceXe dernière54.
2° Les disposi,ons rela,ves aux condi,ons de déten,on et au support du ,tre avec en par1culier,
l’ar1cle L.211-3, alinéa 1er, du Code monétaire et financier55 : « Les )tres financiers, émis en territoire
français et soumis à la législa)on française, sont inscrits soit dans un compte-)tres tenu par
l'émeKeur ou par l'un des intermédiaires men)onnés aux 2° à 7° de l'ar)cle L. 542-1, soit, dans les
cas prévus à l'ar)cle L. 211-7, dans un disposi)f d'enregistrement électronique partagé »56.
3° Les règles rela,ves à l’exercice du droit de propriété, déterminées par référence à la lex rei sitae,
d’après la localisa1on du registre tenu par l’émeXeur ou du compte-1tres tenu par l’intermédiaire,
selon que le 1tre est nomina1f ou au porteur.
Plus spécifiquement, le raXachement au compte résout trois difficultés envisagées par les textes qui
forment l’acquis européen cons1tué par les disposi1ons des trois direc1ves Finalité57,
Assainissement58 et Collatéral59, transposées en droit interne :
- Dans le champ de la direc1ve Finalité, les droits sur les 1tres cons1tués en garan1e au
bénéfice de par1cipants à un système ou de banques centrales – y compris la BCE – sont
soumis à la loi de l’Etat dans lequel est situé le registre, compte ou système de dépôt
centralisé dans lequel leurs droits sont inscrits60 ;
- Dans celui de la direc1ve Assainissement, l’exercice du droit de propriété sur les 1tres inscrits
dans un registre, compte ou système de dépôt centralisé dans un Etat membre est régi par
le droit de cet Etat61 ;

54 On observe également de manière juste et courante que le périmètre de la loi de l’émeneur est entendu plus largement concernant

les +tres de capital, les +tres de créances ouvrant un plus large espace à la loi d’autonomie pour régir le contrat d’émission.
55 Auquel renvoie l’ar+cle L.228-1, al. 6 C.com. au sujet des valeurs mobilières émises par les sociétés par ac+ons.
56 Y font excep+on les cer+ficats représenta+fs : R.211-7 COMOFI : « Un dépositaire central peut créer des cer+ficats représenta+fs de

+tres financiers français ne pouvant circuler qu'à l'étranger.


Il peut déléguer ce droit à un adhérent pour une émission déterminée ».
57 Direc+ve 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère défini+f du règlement dans les

systèmes de paiement et de règlement des opéra+ons sur +tres (JOCE, n° L 166, 11 juin 1998, p. 45–50)
58 Direc+ve no 2001/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 avril 2001 concernant l'assainissement et la liquida+on des

établissements de crédit (JOCE, no L 125, 5 mai 2001)


59 Direc+ve 2002/47/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juin 2002 concernant les contrats de garan+e financière (JOCE, n°

L 168, 27 juin 2002, p. 43–50)


60 Direc+ve finalité, art. 9 (L. 330-2 IV, du Code monétaire et financier).
61 Direc+ve Assainissement, art. 24 (L. 613-31-8, du Code monétaire et financier).

12
- Enfin, dans le champ de la direc1ve Collateral rela1ve au régime applicable aux contrats de
garan1e financière, la nature juridique et les effets patrimoniaux de la garan1e sous forme
d’instruments financiers transmissibles par inscrip1on en compte sont soumis à la loi du pays
où le compte per1nent est situé62.

Le critère commun sur lequel repose l’acquis européen impose l’iden1fica1on du compte per1nent.
Il exclut ainsi tout choix dans la détermina1on de l’intermédiaire per1nent, à la différence de celui
adopté par la Conven)on du 5 juillet 2006 sur la loi applicable à certains droits sur des )tres détenus
auprès d'un intermédiaire.
Il soulève ainsi en lui-même des difficultés de mise en œuvre dans la détermina1on du compte
per1nent. Le compte présentant en lui-même une dimension immatérielle, plusieurs modes de
raisonnement sont possibles pour déterminer l’intermédiaire teneur de compte. La Commission
européenne sou1ent la nécessité d’une interpréta1on commune des raXachements des trois
direc1ves et re1ent pour valables les éventuelles différences d’approche de la ques1on dans les
différents droits na1onaux63 dont, en par1culier, celles déterminant le raXachement au lieu de
presta1on du service de conserva1on ou au lieu de tenue de compte tel qu’iden1fié dans la
conven1on de tenue de compte64.
4° Enfin, l’ar1cle L.211-41 du Code monétaire pose un principe d’assimila,on des ,tres émis sur le
fondement d’un droit étranger aux fins des ar1cles L. 211-3 à L. 211-40-1 du Code monétaire et
financier, qui donne peu lieu à conten1eux65 et dont la portée n’a guère été fouillée en doctrine66.

62 Direc+ve collatéral, art. 9 (art. L.211-39, du Code monétaire et financier).


63 Commission européenne – Fiche d’informa+on, Obliga+ons garan+es, distribu+on transfron+ère des fonds d'inves+ssement et
transac+ons transfron+ères sur des créances ou des +tres (europa.eu), spec. §4. Sur la Communica+on de la Commission sur la loi
applicable aux +tres: “Cene communica+on expose le point de vue de la Commission sur la manière dont les disposi+ons concernées
de la DCDR, de la direc+ve concernant la liquida+on et de la DCGF peuvent actuellement être appliquées. La Commission est d'avis
que la différence de formula+on entre les trois direc+ves n'implique aucune différence quant au fond. En outre, sans préjudice
d'éventuelles décisions futures de la Cour de jus+ce de l'Union européenne, la Commission est d'avis que toutes les différentes façons
de déterminer où un compte est «situé» ou «tenu» en vertu de la loi na+onale sont valables. La Commission pourrait être amenée à
l'avenir à examiner, en fonc+on des évolu+ons interna+onales, de la technologie ou des marchés, si une autre solu+on permenrait
d'obtenir de meilleurs résultats ».
64 Communica+on de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au comité des

régions sur la loi applicable aux effets patrimoniaux des transac+ons sur +tres, COM(2018) 89, 12 mars 2018 (hnps://eur-
lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52018DC0089&from=FR), spéc., point 3.2., p. 6.
v. le Rapport sur le nan+ssement de +tres financiers dans l’Union européenne du Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris
Octobre 2021, pp. 12-13.
65 Visé par ex., en faveur de l’assimila+on, par AMF, CDS, 12 oct. 2016, SAN-2016-13, p. 6, au sujet d’ac+ons d’une société anonyme de

droit panaméen aux fins de la qualifica+on de l’ac+vité de CIF ; à l’encontre de l’assimila+on, AMF, CDS, 1er juill. 2019, SAN-2019-09,
n° 109, écartant l’assimila+on des parts d’une Limited Liability Company américaine aux fins d’inves+ssement immobiliers de la
qualifica+on de +tre de capital émis par une société par ac+ons, confirmé par CE, 6ème - 5ème ch., réunies, 24 nov. 2021, n° 434011.
66 Ce texte soulève essen+ellement deux problèmes d’interpréta+on. Le premier est lié à la portée de l’assimila+on, compte tenu des

disposi+ons rela+ves au régime des +tres financiers. Cene assimila+on induit-elle le respect de la dématérialisa+on ? des règles
rela+ves au transfert de propriété et à la négociabilité ? de celles rela+ves au nan+ssement ? Ces ques+ons sont-elles dissociables ?
Le second est lié aux qualifica+ons u+lisées, qui supposent de déterminer les instruments équivalents et droits représenta+fs par
référence à la no+on de « placement financier » qui tend logiquement à englober les dis+nc+ons du droit français entre +tres de
capital, de créances et d’ac+ons ou parts d’OPC, et à la no+on d’en+té. Si l’acte d’émission fonde l’assimila+on, la mise en œuvre de
l’assimila+on suppose une iden+fica+on et une reconnaissance d’en+té dis+nctes de celles visées à l’ar+cle L.211-2 du Code monétaire
et financier.
13
2.1.2. EvoluUons envisagées.
A 1tre liminaire, les règles et principes qui viennent d’être rappelés ont été maintenus à défaut de
ra1fica1on par l’Union européenne de la Conven1on de La Haye sur la loi applicable aux 1tres
intermédiés.
Plusieurs proposi1ons ont néanmoins été faites pour préciser ou simplifier l’état du droit existant.
Au plan interne, les principales résultent d’un rapport déjà évoqué, tendant à préciser l’étendue des
ques1ons relevant de la loi de l’émeXeur, la soumission des 1tres nomina1fs à la loi de l’émeXeur
ou à la loi désignée sur renvoi par celle-ci et à déterminer un raXachement spécifique pour les 1tres
intermédiés.
Le groupe de travail a relevé en par1culier l’intérêt et l’actualité de la proposi1on faite d’une
inscrip1on dans la loi d’une règle de conflit déterminant le champ d’applica1on de la loi de
l’émeXeur67.
Les discussions ont en outre souligné l’intérêt de la méthode adoptée dans la détermina1on de la
portée de la règle de conflit, par référence aux effets patrimoniaux, ainsi que le précisait la
disposi1on rela1ve aux 1tres intermédiés68.
Au niveau de l’Union, une ini1a1ve à ce jour non suivie d’effet tendait, entre autres, à préciser le
critère du raXachement au compte69. La réflexion à ce sujet a été repoussée70.

2.2. Adapta:on du critère de raHachement pour les :tres financiers inscrits en


registres distribués.

Différents travaux de place réalisés à l’étranger71 ont mis en évidence la difficulté générale de
localisa)on des ac1fs inscrits sur un registre distribué. C’est en réponse à ceXe difficulté que les
Principes Unidroit souscrivent à un raXachement de principe fondé sur la loi d’autonomie.
Dans le contexte du droit français, un problème de détermina1on du raXachement est également
observable compte tenu du raXachement au compte en usage pour les 1tres inscrits en compte.
Enoncé sous forme de principe à l’ar1cle L.211-3, alinéa 2 du Code monétaire et financier, le principe

67 Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, préc., dans lequel figure un futur
ar+cle L.211-15 iden+fiant les ques+ons relevant de la loi de l’émeneur. Ini+alement inscrite dans le projet de réforme du droit des
+tres, elle a été re+rée du texte final de l’Ordonnance n° 2009-15 du 8 janvier 2009 rela+ve aux instruments financiers. Cene
proposi+on s’inscrit en cohérence avec d’autres proposi+ons ultérieurement formulées tendant à préciser parallèlement le domaine
de la lex societa+s : Rapport sur le ranachement des sociétés, Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris, 31 mars 2021.
Règle propre au droit des sociétés, elle n’en présente pas moins un intérêt pour déterminer ce qui relève de la loi de l’émeneur et ce
qui relève de la loi applicable au +tre comme objet de propriété, pour compléter la modifica+on proposée du ranachement au siège
réel en faveur du siège statutaire. Le même rapport propose ainsi en complément d’iden+fier par énuméra+on non limita+ve les
ques+ons relevant de la lex societa+s dans un futur ar+cle 1837-1 du Code civil disposant, entre autres que « La loi applicable à la
société en vertu de l’ar+cle précédent régit notamment : (…) k) les droits et obliga+ons des associés ; l) la preuve, l’acquisi+on et la
perte de la qualité d’associé ; m) la détermina+on des +tres suscep+bles d’être émis par la société (…) ».
68 V. note 15.
69 Communica+on de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au comité des

régions sur la loi applicable aux effets patrimoniaux des transac+ons sur +tres, préc.
70 Ibid. et Commission européenne – Fiche d’informa+ons préc. note 53.
71 FMLC, Distributed Ledger Technology and Governing Law : Issues of Legal Uncertainty, préc.

14
d’équivalence commande de manière générale l’extension des disposi1ons de droit substan1el
applicables aux 1tres inscrits en compte à ceux inscrits dans un registre distribué.
Il n’apparaît toutefois pas possible, en droit interna1onal privé, d’iden1fier un équivalent au compte-
1tres dans le contexte des registres distribués. Reposant sur une succession d’inscrip1ons
horodatées qui relatent des transac1ons, le registre distribué opère à l’image d’un livre-journal
davantage qu’un compte-1tres.
Le groupe de travail a relevé à cet égard que le recours à un registre distribué ne change pas
fondamentalement la pra1que des émeXeurs concernant les 1tres nomina1fs, en termes de
comptabilité, compte tenu des nécessités de mise à jour périodique des comptes-1tres individuels
en correspondances avec le registre de mouvements des 1tres. Le support n’en est pas moins
men1onné en termes différents.
Le principe d’équivalence invite ainsi à individualiser l’instrument et à opérer son transfert par
l’inscrip1on dans le registre distribué. Les éventuels relevés d’opéra1ons communiqués aux 1tulaires
par l’accès à leurs wallets demeurent ainsi extérieurs à ceXe inscrip1on et soustraits à la mise en
œuvre du principe d’équivalence.
Il en résulte que l’iden1fica1on de la loi applicable par référence à la localisa1on du compte
per1nent, propre au droit des 1tres, ne saurait être mise en œuvre, dans sa double accep1on.
Le critère de raXachement cons1tué par la localisa1on de l’intermédiaire per1nent résultant de la
Conven,on de La Haye rela)ve à la loi applicable à certains droits sur des )tres détenus auprès d’un
intermédiaire est en décalage pra1que avec l’absence de déten1on intermédiée, le 1tre n’étant
inscrit que dans le registre distribué.
Ensuite, selon l’acquis européen, l’absence de compte exclut logiquement toute possibilité de
raXachement au compte. Les exemp1ons du régime pilote suggèrent que la DLT offre la possibilité
de s'affranchir du concept de compte-1tres, permeXant ainsi de se passer d'un TCC (teneur de
compte conservateur) pour réaliser une centralisa1on par le biais de la DLT72. Par conséquent, il
apparaît inadapté d'établir une règle de droit interna1onal privé reposant sur un raXachement au
compte.
Il est ainsi impossible de réaliser une applica1on du critère du compte sans méconnaître la difficulté,
compte tenu des différentes modalités de tenue du registre (2.2.1) respec1vement applicables aux
1tres nomina1fs (2.2.2.) et aux 1tres soumis au régime pilote (2.2.3.).

2.2.1. Nécessité de différencier les Utres nominaUfs et les Utres soumis au régime pilote.
A l’examen, le droit substan1el des 1tres financiers permet de surmonter la difficulté. On peut en
effet observer au sujet des 1tres inscrits en compte que, par le biais du raXachement au compte,
l'élément déterminant en pra1que est l'iden1fica1on de l'intermédiaire per1nent, plutôt que le

72 Considérant 30. Il faut ainsi souligner que l’atout majeur de la DLT réside dans sa capacité à fusionner conserva+on (y compris la

conserva+on au niveau de l'inves+sseur), négocia+on et règlement en une opéra+on unique.


15
compte en lui-même73. Le raisonnement s’ar1cule autour du critère de l’en1té garan1ssant
l’intégrité juridique du 1tulaire du droit.
Or le droit posi1f repose sur deux systèmes alterna1fs de tenue de registre permeXant
l’iden1fica1on d’un conservateur :
- Pour les 1tres nomina1fs soumis au disposi1f de l’ordonnance « Blockchain » du 8 décembre
2017, le registre est tenu par l’émeXeur74 - ou son mandataire75 ;
- Pour les 1tres soumis au régime pilote, l’enregistrement et/ou l’inscrip1on sont assurés par
une infrastructure DLT. Il convient ainsi d’iden1fier l’ac1vité de tenue de registre cons1tuant
le raXachement le plus per1nent entre l’enregistrement ou l’inscrip1on.

2.2.2. Ra_achement des Utres nominaUfs à la loi de l’éme_eur.


Le cas des 1tres nomina1fs est apparu faiblement probléma1que aux fins de détermina1on de la loi
applicable. Leur inscrip1on dans un registre tenu par l’émeXeur permet une déclinaison commode
des principes de droit interna1onal privé applicables aux 1tres nomina1fs. La loi de l’émeXeur offre
une fixité et une sécurité pour les 1ers et trouve à s’appliquer comme loi de tenue de registre par
simple adapta1on du critère de la tenue de compte.
La présence éventuelle d’un mandataire chargé par l’émeXeur de l’administra1on des inscrip1ons
ne modifie pas davantage l’analyse au sujet d’un registre distribué qu’au sujet d’un compte-1tres, à
défaut de toute disposi1on par1culière rela1ve au statut de ce mandataire, la responsabilité de
tenue de l’inscrip1on reposant en toute hypothèse sur l’émeXeur76.
S’agissant ainsi d’une simple déclinaison de la règle en usage dans le contexte de la réalisa1on des
inscrip1ons sur registre distribué, il ne semble pas nécessaire au groupe de la formuler dans une
disposi1on spécifique.
La formula1on d’une telle disposi1on de manière expresse pourrait toutefois être l’occasion de
proclamer la solu1on tant pour les 1tres inscrits en compte qu’au sein d’un registre distribué77.

ProposiUon N° 1 : Les Utres nominaUfs inscrits dans un registre distribué devraient être soumis,
pour leurs condiUons et effets patrimoniaux, à la loi de l’éme_eur.

73 En ce sens, Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, Prés. H. Synvet, n° 13, p.
5.
74 L.211-7, al. 2, CMF. Adde, R.211-2, CMF et 322-2, II, RG AMF.
75 Art. R. 211-3, CMF.
76 Cf.,C. mon. fin., art. L. 211-8 et R. 211-3.
77 En ce sens, la proposi+on du Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, Prés. H.

Synvet, p. 6, la proposi+on d’un nouvel ar+cle sous le numéro L.211-16.


Compte tenu de l’absence de toute responsabilité propre reconnue au mandataire à l’égard des inves+sseurs inscrits, le groupe de
travail n’a pas souhaité se prononcer, lors des discussions, sur l’opportunité de l’admission du renvoi en la ma+ère.
16
2.2.3. DéterminaUon du ra_achement pour les Utres soumis au régime pilote : Lieu de situaUon
de l’infrastructure d’enregistrement78 - SR ou SNR DLT.

Dans la détermina1on du raXachement pour les 1tres soumis au régime pilote, le groupe de travail
a été animé par une double préoccupa1on. Il convient d’adopter une solu1on cohérente avec le
contenu du règlement dans son ensemble, en vue d’une éventuelle généralisa1on à l’échelle
européenne par adapta1on des solu1ons composant l’actuel acquis européen, d’une part, et qui
1enne compte de la double réalité représentée par la réalisa1on d’actes de disposi1on réalisés
directement sur le registre distribué ou en dehors (« on/chain v. off/chain transac1ons »79), d’autre
part80.
A cet égard, il est apparu par analogie avec les 1tres inscrits en compte qu’un raXachement objec1f
présentait l’avantage indiscutable de la sécurité juridique par l’unifica1on de la loi applicable à
l’exécu1on de la transac1on et à l’inscrip1on dans le registre suscep1ble d’en résulter81.
Sur ces bases, la réflexion a mis en lumière la per1nence d’un raXachement à l’infrastructure de
marché, en charge de l’enregistrement du 1tre lui-même ou de sa conserva1on82. Il s’agira selon les
cas d’un système de règlement DLT (ci-après, « SR DLT ») ou d’un système de négocia1on et de
règlement DLT (ci-après, « SNR DLT »)83.
Ce choix a d’abord paru préférable à d’autres ra_achements objecUfs. Il a en par1culier paru plus
adapté à l’objet de la règle de conflit que le raXachement à l’autorité de surveillance. Il a été observé
que ce dernier raXachement présente différents intérêts. Il fait coïncider le traitement des ques1ons
de droit privé avec l’applica1on d’un disposi1f de régula1on84. Il permet en outre de limiter
incer1tudes pouvant affecter l'infrastructure en cas de changement de son siège social.

78 Ce critère rejoint, parmi ceux iden+fiables, à celui de l’opérateur du système désigné dans les travaux du FMLC (p. 18-19, n° 6.16-

6.19) comme « PROPA - Place of the Relevant Opera+ng Authority/Administrator ». Dans le champ du règlement régime pilote, il
apparaît préférable de s’en tenir à une présenta+on suivant les défini+ons et concepts de celui-ci.
79 En général, sur la dis+nc+on et les modalités des transferts on-chain et off-chain, UK Jurisdic+on Taskforce Legal Statement (n 19)

paras 45 and 48.


80 V. Ques+ons and Answers On the implementa+on of Regula+on (EU) 2022/858 of the European Parliament and of the Council of 30

May 2022 on a pilot regime for market infrastructures based on distributed ledger technology, 2 June 2023 ESMA70-460-189, dans
lequel l’ESMA précise que la tokenisa+on par+elle est possible. Il revient à l’infrastructure de se charger de la réconcilia+on entre les
deux émissions.
81 Comp. Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, 1er juillet 2008, Prés. H. Synvet, n° 13, p. 5.
82 Selon la défini+on qu’en donne l’ar+cle 2, 7), cons+tue un « système de règlement DLT » ou « SR DLT », « un système de règlement

qui règle des transac+ons sur des instruments financiers DLT contre paiement ou contre livraison, indépendamment du fait que ce
système de règlement ait été conçu et no+fié conformément à la direc+ve 98/26/CE, et qui permet l’enregistrement ini+al
d’instruments financiers DLT ou permet la fourniture de services de conserva+on d’instruments financiers DLT ».
83 Au sens de l’ar+cle 2, 10), est « système de négocia+on et de règlement DLT » ou « SNR DLT », « un MTF DLT ou un SR DLT qui

combine les services proposés par un MTF DLT et un SR DLT ».


84 Comp. le choix opéré par le §32 de la Loi allemande sur les +tres électroniques (Gesetz über elektronische Wertpapiere – eWpG),

Journal officiel fédéral allemand (BGBl.), 3 juin 2021, par+e I, p. 1423 : « § 32 Anwendbares Recht (1) Soweit nicht § 17a des
Depotgesetzes anzuwenden ist, unterliegen Rechte an einem elektronischen Wertpapier und Verfügungen über ein elektronisches
Wertpapier dem Recht des Staates, unter dessen Aufsicht diejenige registerführende Stelle steht, in deren elektronischem
Wertpapierregister das Wertpapier eingetragen ist. (2) Steht die registerführende Stelle nicht unter Aufsicht, so ist der Sitz der
registerführenden Stelle maßgebend. Ist der Sitz der registerführenden Stelle nicht bes+mmbar, so ist der Sitz des Eminenten des
elektronischen Wertpapiers maßgebend ». « Sec. 32 – Applicable Law (1) Unless Sec. 17a of the German Securi+es Deposit Act
(Depotgesetz) applies, rights in an electronic security and disposi+ons of an electronic security shall be governed by the law of the
country under whose supervision the registrar in whose electronic securi+es register the security is entered is located. (2) If the registrar
17
Le raXachement à l’autorité de surveillance a paru toutefois non per1nent pour un certain nombre
de raisons.
- Si leurs résultats pra1ques sont proches, les raXachements énoncés à l’ar1cle 12 du
règlement régime pilote ont l’inconvénient de déterminer l’autorité compétente de manière
différente en fonc1on de l’exploitant et du type d’infrastructure85.
- De plus, ce raXachement est fondé sur une analyse de l’infrastructure comme en1té régulée
qui n’a pas été retenue pour déterminer le raXachement au compte de l’intermédiaire
per1nent en droit des 1tres. Les droits dont ils font l’objet et les modalités de circula1on des
1tres ne relèvent pas du régime pilote. Dans une perspec1ve française et européenne, ce
critère est ainsi étranger à la réflexion rela1ve au critère de raXachement rela1ve aux
condi1ons et effets patrimoniaux des 1tres inscrits en compte.
- En outre, le raXachement à l’autorité compétente ne dispense pas, dans le contexte du
régime pilote, de la réflexion à mener pour déterminer quelle infrastructure doit être prise
en compte.

Il a ensuite été observé que dans le régime pilote, deux ra_achements disUncts peuvent être
idenUfiés en foncUon des acUvités conduites par les infrastructures DLT, selon qu’elles opèrent une
inscripUon des Utres par admission aux négociaUons ou procèdent à leur enregistrement iniUal86.
Le raXachement à l’infrastructure d’inscrip1on - « système mul1latéral de négocia1on DLT » ou
«MTF DLT»87 présente en effet une faiblesse importante. Con1ngent, il impose d’adopter un
raXachement subsidiaire peu évident à déterminer et à meXre en œuvre, rendant plus complexe le
maniement de la règle de conflit.
Un tel critère subsidiaire est délicat à iden1fier autrement qu’au lieu depuis lequel opère
l’inves1sseur. Ce raXachement subsidiaire est doublement probléma1que88.
Il suggère une analyse en droit substan1el qui autorise l’inves1sseur à se connecter directement à
la DLT et à accomplir les ac1vités de conserva1on de ses propres 1tres. L’approche de la ques1on
n’est pas harmonisée au niveau européen. En l’état des disposi1ons du Code monétaire et financier,
l’ac1vité d’intermédia1on89 est en effet limitée à l’administra1on d’instruments financiers. Le service

is not under supervision, the registered office of the registrar shall be decisive. If the registered office of the registrar cannot be
determined, the registered office of the issuer of the electronic security shall be decisive” (English Convenience Transla+on by Prof. Dr.
Christoph H. Seibt, accessible au lien suivant: hnps://www.degruyter.com/document/doi/10.9785/9783504388010-009/html,
consulté pour la dernière fois le 18 mars 2024).
85 Cet ar+cle est ainsi conçu aux fins de coordina+on avec le disposi+f de régula+on dont relève l’exploitant. Ainsi, pour les MTF DLT et

SNR DLT, si l’exploitant est une entreprise d’inves+ssement, le ranachement s’effectue à l’autorité de l’Etat d’origine, soit l’état du siège
(art. 4, paragraphe 1, point 55) a) ii) et iii), de la direc+ve 2014/65/UEDirec+ve MIF). Décliné par analogie, c’est là encore l’autorité de
surveillance de l’état du siège qui serait compétente lorsque l’exploitant est un opérateur. Pour les SR ou SNR DLT, l’autorité compétente
sera déterminée selon l’ar+cle 2, paragraphe 1, point 23), du règlement (UE) no 909/2014 définissant comme Etat membre d’origine
l’Etat d’établissement du dépositaire central de +tres exploitant l’infrastructure.
86 Art. 2, 7), préc.
87 Art. 2, 6).
88 Outre la réflexion tradi+onnelle à mener quant à l’iden+fica+on du ranachement lui-même selon que l’inves+sseur est une personne

morale ou une personne physique, et, en ce dernier cas, entre le domicile et la résidence habituelle, ce dernier paraissant plus adapté
pour les personnes physiques.
89 R.211-4, al. 2, COMOFI : « Un propriétaire de +tres financiers au porteur inscrits dans un disposi+f d'enregistrement électronique

partagé en applica+on du règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour
les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, et modifiant les règlements (UE) n° 600/2014 et (UE)
n° 909/2014 et la direc+ve 2014/65/ UE peut charger un intermédiaire men+onné à l'ar+cle L. 211-3 ou une “ infrastructure de marché
DLT ” au sens de ce même règlement de détenir les moyens d'accès à ses +tres, y compris sous la forme de clés cryptographiques
18
porte sur la « déten1on des moyens d’accès aux 1tres » et non sur les 1tres eux-mêmes de sorte
qu’il est exclu d’y voir un véritable élément permeXant de les localiser. Même en présence d’un
intermédiaire, les 1tres restent inscrits et situés au niveau de l’infrastructure de marché SR/ SNR
DLT.
Il conduit en outre, en pra1que, à un morcellement de la loi applicable à des 1tres iden1ques, inscrits
dans un même système de règlement.
Le raXachement fondé sur l’infrastructure d’enregistrement offrant le service de conserva1on ne
présente aucun de ces inconvénients.
Enfin, le ra_achement fondé sur l’infrastructure d’enregistrement présente plusieurs avantages
intrinsèques.
Il assure l’unité de la loi applicable à la transac1on et à l’inscrip1on. La fixité du critère ne remet pas
en cause la possibilité de réalisa1on de transac1ons « off-chain » soumises à la loi d’autonomie pour
la détermina1on des obliga1ons des par1es à l’acte de cession, non plus que l’interven1on, comme
lois de police90, de disposi1ons déterminant les délais de négocia1on et de règlement, suscep1bles
d’être complétées par des règles de marché.
Le raXachement à la loi du siège social de l’infrastructure procède d’une analyse de la localisa1on
des 1tres sur le terrain substan1el. Il est cohérent avec les choix opérés par la loi n° 2023-171 du 29
mars 2023 et du son décret d’application n° 2023-421 du 31 mai 2023, permettant la possibilité pour
les titres financiers numériques de revêtir la forme au porteur aux fins d’une admission aux
opérations d’une infrastructure de marché DLT91. L’option ainsi choisie permet de considérer la
localisation des titres au niveau de l’infrastructure de marché qui opère la DLT. Le choix d’un
semblable rattachement s’attache à la forme au porteur du titre tel qu’il est analysé sur le terrain
substantiel.
Le raXachement au siège de l’infrastructure d’enregistrement (SR/SNR DLT) assure la prévisibilité de
la loi applicable et la sécurité juridique à deux égards. L’infrastructure devra être agrée dans le cadre
du Régime pilote par l’Autorité compétente de son lieu d’établissement. Aussi, l’infrastructure sera
réputée être là où elle a été agréée92. En outre, ce raXachement conduit à déterminer le droit
applicable, indépendamment de la présence d’un intermédiaire réalisant des ac1vités
d’administra1on93.

privées, et de traiter les événements concernant ces +tres, dans les condi+ons fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés
financiers ».
90 Lois de police telles que définies de manière générale à l’ar+cle 9 du règlement Rome I et trouvant à s’appliquer indépendamment

de la recherche et de l’analyse du contenu de la loi par ailleurs éventuellement choisie entre les par+es pour régir leurs obliga+ons
respec+ves.
91 Art. L.211-7, al. 3 et R. 211-2, al. 2, COMOFI. Op+on préconisée par le rapport du HCJP sur la réforme des +tres financiers numériques,

20 mai 2022, p. 5 et pp. 9-13 : hnps://www.banque-france.fr/fr/system/files/2023-10/rapport_49_f.pdf.


92 La logique d’exercice de l’ac+vité selon un mécanisme de passeports sera iden+que à celle des disposi+fs MIF ou DCT auxquels

renvoie l’ar+cle 12. Le règlement permenra en toute hypothèse de localiser l’infrastructure via son agrément et son autorisa+on dans
le cadre du régime pilote.
93 R.211-4, alinéa 2 du Code monétaire et financier.

19
2.3. Portée du raHachement – inclusion des ques:ons rela:ves à la cons:tu:on
et à l’opposabilité des sûretés cons:tuées.

Une brève analyse de la per1nence du raXachement doit être réalisée pour envisager l’inclusion
dans le champ de la loi désignée de la cons1tu1on et l’opposabilité des sûretés légales ou
conven1onnelles suscep1bles de grever les 1tres financiers.
Le lieu de situa1on du système de règlement et de négocia1on est un raXachement qu’il est
per1nent et opportun d’étendre en la ma1ère.
La soumission de la cons1tu1on et de l’opposabilité à une loi iden1que à celle commandant les
autres effets patrimoniaux est un facteur important de simplifica1on dont il convient d’évaluer la
per1nence.
Outre la simplification qu’elle apporte par l’unification des questions relevant de la loi applicable, il
faut observer que l’inclusion des sûretés est conforme à la logique de l’acquis européen et, en
particulier, de la Directive Finalité94. Tant pour les sûretés constituées au sein d’un système95 que
pour les droits et obligations résultant de son fonctionnement, la loi du système est applicable. Le
rattachement suit ainsi une logique d’unification de la loi applicable au sein du système et suggère
l’intérêt de son extension pour les droits et obligations hors système, en particulier à l’égard du
créancier muni de sûreté.
Le groupe de travail n’a ainsi relevé aucune objection à l’encontre d’une soumission de la
constitution et de l’opposabilité des sûretés conventionnelles à la loi applicable aux autres effets
patrimoniaux.

Proposition n° 2 : le groupe de travail préconise l’inclusion, dans la sous-section du Code


monétaire et financier relative à l’inscription des titres financiers, d’une règle de conflit spécifique
soumettant, quant à leurs conditions et effets patrimoniaux, les titres financiers relevant du
régime pilote à la loi du système de règlement ou du système de négociation et de règlement DLT.

« L. XXX Code monétaire et financier : Les conditions et effets patrimoniaux des opérations sur des
titres financiers inscrits au moyen d’une technologie des registres distribués dans les conditions
fixées par le règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un
régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres
distribués, et modifiant les règlements (UE) n° 600/2014 et (UE) n° 909/2014 et la directive
2014/65/UE sont déterminés par la loi de l’Etat où est située l’entité autorisée pour opérer le
système de règlement DLT ou le système de négociation et de règlement DLT, le cas échéant ».

Selon la méthode rappelée en introduction, en faveur de l’identification de la portée du


rattachement, le groupe de travail s’est également accordé pour suggérer une formulation possible

94 Direc+ve finalité, art. 9.2 (L. 330-2 IV, du Code monétaire et financier).
95 V. art. L.330-1, I du Code monétaire et financier.
20
d’un complément à la règle de conflit ainsi formulée, par un énoncé indicatif de la portée du
rattachement choisi.

« Sont soumis à la loi ainsi désignée, notamment, la nature des droits dont ces titres sont l’objet,
l’opposabilité de ces droits aux tiers, le régime de leur transmission, les conditions de la revendication
des titres financiers, la constitution et les effets des garanties conventionnelles sur titres financiers,
les sûretés légales susceptibles de les grever, le conflit de droits concurrents portant sur les mêmes
titres financiers »96.

III. Détermina6on du droit applicable aux autres ac6fs inscrits en


registres distribués.

Le groupe de travail a envisagé dis1nctement les condi1ons d’élabora1on d’une règle de conflit
consacrée aux ac1fs inscrits en registres distribués autres que les 1tres financiers. La réflexion
rela1ve à la nécessité d’introduire une règle de conflit s’inscrit dans un triple contexte :

- Au niveau interne, il n’existe aucune règle de conflit spécifiquement consacrée à ces ac1fs
nouveaux. Le projet de Code de droit interna1onal privé établi sous l’égide de la Chancellerie
ne comporte d’une manière générale, aucune disposi1on rela1ve aux instruments
dématérialisés et aux 1tres représenta1fs.
Les seules disposi1ons rela1ves aux propriétés incorporelles concernent les droits de propriété
intellectuelle (art. 105 et s.). Pour l’hypothèse où cet instrument serait adopté, sa seule portée
systéma1que suscep1ble d’être men1onnée 1ent à la délimita1on générale du droit applicable en
ma1ère de droits réels entendue, au sens de son ar1cle 97 comme « le droit de propriété, les droits
sur la chose d’autrui et les sûretés réelles ».

- Au niveau européen, la réflexion rela1ve aux raXachements des instruments inscrits sur un
registre distribué avait été incidemment repoussée dans un document de travail, la jugeant
prématurée97. Elle a toutefois été introduite dans le cadre des travaux rela1fs à la proposi1on
de règlement sur la loi applicable à la cession de créances98, dans un document établi par le
Conseil99.

96 Comp. Rapport sur un projet de règle de conflit de lois en ma+ère de +tres financiers, préc., n° 15, p. 6., en par+culier, la proposi+on
d’introduire un ar+cle L.211-17, déjà cité.
97 Commission européenne, « Capital Markets Union : covered bonds, cross-border distribu+on of investment funds and cross-border

transac+ons in claims and securi+es », préc.


98 Proposi+on de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL sur la loi applicable à l’opposabilité des cessions de

créances : COM/2018/096 final - 2018/044.


99 Proposal for a Regula+on of the European Parliament and of the Council on the law applicable to the third-party effects of

assignments of claims - 4 column table”, du 3 décembre 2021.


21
- C’est ainsi essen1ellement à l’échelle internaUonale que de très nombreuses réflexions ont
été conduites. D’étendue et de portée plus ou moins larges, les travaux conduits paraissent
déjà trop nombreux pour faire l’objet d’une présenta1on exhaus1ve dans le cadre du présent
rapport100.
Elles ont connu leur principal abou1ssement avec l’inscrip1on d’une règle de conflit de lois au sein
des Principes Unidroit sur les ac1fs numériques et le droit privé déjà évoquée101. Ces Principes sont
conçus comme un instrument non-contraignant des1né à orienter le développement de la pra1que,
tant des opérateurs que des législateurs na1onaux102, dont l’influence sur le développement d’un
futur cadre conven1onnel demeure incertaine.
L’iniUaUve conjointe Unidroit-Conférence de La Haye.
Dans le prolongement de l’adop1on des Principes Unidroit, une ini1a1ve conjointe a en effet été
entreprise avec la Conférence de droit interna1onal de La Haye en vue de l’édic1on d’un instrument
conven1onnel, inspiré de l’approche des « ac1fs numériques » proposée par les Principes Unidroit
et de la règle de conflit qu’ils renferment.
Ainsi qu’il a été rappelé en introduc1on, ceXe ini1a1ve a été interrompue au début de l’année 2024,
compte tenu des réserves émises notamment par la France et partagées par d’autres membres du
HCCH103.
Loi type de la CNUDCI sur les documents transférables électroniques (2017).
Il faut rapprocher des principes Unidroit, qui ont en vue l’univers des registres distribués, d’une Loi
type de la CNUDCI concernant d’autres représenta1ons électroniques d’ac1fs et instruments du
commerce interna1onal, jusqu’ici exclus des textes d’harmonisa1on conven1onnels104. L’ar1cula1on
du principe de reconnaissance interna1onale des documents transférables électroniques qui en
forment l’objet avec les règles de droit interna1onal privé rela1ves aux ac1fs inscrits en registres
distribués suscite d’importantes réflexions de place à l’étranger105 et appelle un ques1onnement
spécifique dans le contexte de la transposi1on en cours de la Loi type en droit français, par créa1on
d’un régime propre aux 1tres transférables électroniques dans la Proposi)on de loi n°2623 visant à
accroître le financement des entreprises et l’aKrac)vité de la France.
*
Dans ce contexte dense et instable, le groupe de travail n’a pas souhaité formuler de proposi1on sur
chacune des difficultés qui vont être exposées. Il a été jugé préférable de s’en tenir à l’iden1fica1on

100 Outre les travaux déjà cités, on men+onnera sans être exhaus+f les différents travaux, abordant de manière plus ou moins étroite

la ques+on des ac+fs représentés électroniquement, dans le champ du droit des sûretés, la Loi type de la CNUDCI sur les sûretés
mobilières (2016), à ar+culer sur le terrain des conflits de lois avec les travaux de l’European Law Ins+tute, ELI Principles on the Use of
Digital Assets as Security - Report of the European Law Ins+tute, 2022, qui seront évoqués ci-après (3.3.2.) et, en rela+on à la circula+on
des créances, les disposi+ons de la Loi type d’Unidroit sur l’affacturage adoptée lors de la même session que les Principes Unidroit, et
ar+culant des disposi+ons de droit substan+el et un riche chapitre VIII consacré aux conflits de lois.
101 V. supra, 1.2.
102 Principes UNIDROIT 2023 - C.D. (102) 6, Introduc+on des Principes, § 0.3, p. 11.
103 V. supra, l’introduc+on à ce rapport.
104 Ainsi la Conven+on des Na+ons Unies du 23 novembre 2005 sur l'u+lisa+on des communica+ons électroniques dans les contrats

interna+onaux excluait-elle les lenres de change, billets à ordre, aux lenres de transport ou autres instruments transférables donnant
le droit au porteur ou au bénéficiaire de demander la livraison de marchandises ou le paiement d'une somme d'argent.
105 V. au Royaume-Uni, la consulta+on lancée par la Law Commission, Digital assets and ETDs in private interna+onal law: which court,

which law? Call for evidence, Février 2024.


22
des principaux choix à opérer, en fonc1on d’évolu1ons du droit substan1el en cours et dont le sens
n’est pas toujours déjà connu, compte tenu des adapta1ons en discussion du droit français résultant
de l’adop1on du règlement MiCA.
Pour ce faire, le groupe de travail a entrepris de réfléchir à l’élabora1on d’une règle de conflit en
déterminant la catégorie de raXachement (3.1), avant l’iden1fica1on du critère de raXachement
(3.2.). La réflexion a été complétée par des précisions rela1ves à la détermina1on de la portée de la
règle de conflit (3.3.).

3.1. Délimita:on de la catégorie de raHachement.

La diversité des ac1fs et instruments inscrits en registres distribués est considérable. La technologie
de registres distribués a eu comme double effet de donner une forme nouvelle à des instruments
connus et de permeXre l’avènement de nouveaux types d’ac1fs. En raison de ceXe diversité, la
réflexion de droit interna1onal privé peut être très étendue. De manière non nécessairement
exhaus1ve106, le groupe de travail a considéré qu’un certain nombre d’instruments devaient, compte
tenu de leur par1cularisme, être exclus du champ de la réflexion (3.1.1.).
Au bénéfice de ces exclusions, il est nécessaire de déterminer les éléments de droit substan1el
permeXant d’iden1fier en première inten1on une catégorie de raXachement (3.1.2.) et préciser les
alterna1ves méthodologiques ouvertes par celle-ci (3.1.3.).
On soulignera ici que les analyses et alterna1ves men1onnées dans la délimita1on de la catégorie
de raXachement ne préjugent en rien de l’adéqua1on ou de l’inadéqua1on des règles applicables
en droit substan1el, telle qu’elles ont pu être envisagées dans d’autres travaux de place.

3.1.1. AcUfs exclus.


L’iden1fica1on des catégories de raXachement a également conduit le groupe à restreindre le
champ de sa réflexion en opérant une triple exclusion hors du champ de la réflexion des monnaies
numériques émises par les banques centrales (« MNBC ») (i), les « non-fungible tokens » (ii) et les
documents transférables électroniques (iii).

i. MNBC
Compte tenu des ques1onnements concernant leur nature juridique et l’opportunité de leur
émission, ainsi que des travaux en cours au niveau européen sur le sujet et des différentes formes
que pourraient recouvrir les MNBC (MNBC de détail et MNBC de gros), les monnaies numériques de
banque centrale ont été maintenues hors du champ de la réflexion.

106 Par exemple, le groupe de travail n’a ainsi pas conduit d’analyse de la per+nence d’inclure ou d’exclure les crédits carbones. Les

échanges inventoriant la diversité des situa+ons ont conduit à privilégier l’analyse de certains instruments et les jus+fica+ons de leur
exclusion, suscep+bles d’être étendues à d’autre instruments, au bénéfice d’analyses ultérieures et par+culières.
23
Au-delà des ques1onnements rela1fs à leur admission sous l’angle de la poli1que et du droit
monétaire107, celles-ci soulèvent des difficultés spécifiques de raXachement mais aussi de portée de
la loi désignée par la règle de conflit compte tenu de son ar1cula1on avec la loi de l’Etat émeXeur
(lex monetae) qui en détermine les modalités technologiques et juridiques.
Il faut souligner d’abord que les réflexions en cours conduites au HCCH reconnaissent le
par1cularisme des MNBC sur le terrain du droit interna1onal privé108. On observera ensuite que,
théoriquement inclus dans la catégorie des ac1fs numériques définis par les Principes Unidroit, il
résulte du commentaire à ces Principes la nécessité d’une ar1cula1on entre la loi applicable au
MNBC en tant qu’ac1f et la lex monetae conférant un large champ d’applica1on à ceXe dernière au
point de rendre incertain le périmètre de la loi applicable aux MNBC comme objets de propriété109.
Le groupe de travail a ainsi conclu qu’un travail dédié s’imposait, excédant le périmètre de sa
réflexion.

ii. NFT
Ont été exclus les NFT compte tenu d’un certain nombre de difficultés excédant le seul périmètre
d’une réflexion concernant le droit des biens. Les NFT peuvent en par1culier être saisis, au-delà de
leur dimension patrimoniale, sur le terrain du droit de la preuve. En outre, même dans leur
dimension patrimoniale, la détermina1on de la règle de conflit suppose d’examiner leur similarité
avec un objet de propriété intellectuelle. Il a ainsi paru excéder le périmètre du groupe de travail de
conduire une réflexion sur les NFT en eux-mêmes.

iii. Documents transférables électroniques


Ont enfin été exclus les instruments concernés par la Loi-Modèle de la CNUDCI sur les documents
transférables électroniques. La loi-type est un instrument de droit matériel dont les disposi1ons
essen1elles 1ennent en un principe de reconnaissance de l’efficacité et de la validité des documents
transférables électroniques d’un point de vue substan1el (ar1cle 7) et dans un contexte interna1onal
(ar1cle 19), assor1 d’un principe général d’équivalence fonc1onnelle entre l’écrit papier et l’écrit
électronique (chapitre II).
Son champ d’applica1on est toutefois très largement à la main des Etats, seules quelques exclusions
expresses résultant de l’ar1cle 1§3. C’est ainsi aux Etats qu’il appar1ent de déterminer leurs propres
exclusions compte tenu de la concep1on qu’ils se font de certains, instruments, ainsi que les
rédacteurs l’admeXent en par1culier concernant le droit cambiaire110.
En vertu du principe de neutralité technologique qui leur est commun, ceXe loi-type et les Principes
Unidroit appellent une coordina1on dans d’hypothé1ques textes de transposi1on.

107 IMF Working Paper, Legal Aspects of Central Bank Digital Currency: Central Bank and Monetary Law Considera+ons, WP/20/254,
November 2020.
108 Travaux exploratoires : Aspects de droit interna+onal privé des monnaies numériques de banques centrales (MNBC) – Document

Doc. prél. No 4 de janvier 2024


109 Principes UNIDROIT 2023 - C.D. (102) 6, note explica+ve, n° 2.12. En marge de la loi applicable à l’ac+f comme objet de propriété,

la Lex monetae a voca+on à régir, entre autres les rela+ons du détenteur avec la Banque centrale émenrice, le statut de la monnaie,
entendu comme sa conver+bilité en monnaie fiduciaire, son cours légal...
110 v. n°s 30 à 33 de la note explica+ve

24
Les raisons à leur exclusion du champ de la réflexion du présent rapport sont essen1ellement de
deux ordres.
D’une part, la loi-modèle n’entend pas affecter les règles de conflits de lois existantes rela1ves aux
différents types d’instruments répondant à la qualifica1on de documents transférables
électroniques. L’ar1cle 19.2 énonce ainsi qu’ « aucune disposi)on de la présente Loi n’a d’incidence
sur l’applica)on aux documents transférables électroniques de règles du droit interna)onal privé
régissant les documents ou instruments transférables papier ». La réflexion rela1ve à la
détermina1on d’une règle de conflit supposerait ainsi sa confronta1on avec le cadre préexistant qui
est extrêmement étendu et répond à ses impéra1fs propres, en ma1ère cambiaire ou en ma1ère de
transport, par exemple111.
Ainsi qu’il a été men1onné plus haut, la réflexion de droit interna1onal privé à mener implique de
considérer les choix de transposi1on actuellement en discussion au Parlement concernant la
proposi1on de loi n° 2623 visant à accroître le financement des entreprises et l’aXrac1vité de la
France, ins1tuant dans son actuel 1tre II un régime propre aux 1tres transférables électroniques, à
ses ar1cles 7 et 8, iden1fiant son porteur à celui qui dispose de son contrôle exclusif.
D’autre part, dans la mesure où les registres distribués ne sont qu’une modalité de numérisa1on
d’instruments de droit privé, la difficulté consiste à déterminer si les documents et instruments visés
par la Loi-type peuvent également recevoir la qualifica1on d’ac1fs numériques au sens des Principes
Unidroit. La difficulté a été vue par les rédacteurs des principes Unidroit. S’ils peuvent être qualifiés
comme « ac1fs numériques » selon les Principes Unidroit, les documents transférables
électroniques demeurent soumis aux règles substan1elles et de conflit qui leur sont propres, compte
tenu de leurs par1cularités. Dans la note explica1ve, il est en effet proposé de surmonter ceXe
difficulté d’ar1cula1on en conférant une priorité d’applica1on aux lois de transposi1ons propres aux
documents transférables électroniques sur les règles rela1ves aux ac1fs numériques112.

3.1.2. Données générales sur la qualificaUon des « crypto-acUfs ».


La qualifica1on des ac1fs en registres distribués en droit substan1el est essen1elle à la bonne
iden1fica1on de la catégorie de raXachement. Une difficulté résulte ainsi de l’analyse des ac1fs
autres que les 1tres financiers en droit substan1el, qui demeure largement à construire. Les
réponses très diverses apportées en droit comparé soulignent la difficulté de l’entreprise. Plusieurs
systèmes juridiques ont élaboré des qualifica1ons originales, d’étendue variable en fonc1on de la
tradi1on juridique et de l’objet de la législa1on en la ma1ère :
- Le droit des Etats-Unis a déjà été men1onné113 et se singularise. Il propose désormais une
qualifica1on unitaire, fondée sur le critère du contrôle avec les Controllable Electronic
Records (CER) objet de l’ar1cle 12 du Uniform Commercial Code114, tandis qu’en termes de

111 Il y a donc lieu, d’un point de vue français, de con+nuer à raisonner par exemple avec le système de Genève (7 juin 1930) pour les

lenres de change ou les règles de « La Haye-Visby » pour le connaissement (la Conven+on de Bruxelles du 25 août 1924 pour
l’unifica+on de certaines règles en ma+ère de connaissement a fait l’objet de deux protocoles modifica+fs des 23 février 1968 et 21
décembre 1979 (« Règles de La Haye-Visby »).
112 Sur la prévalence des disposi+ons éta+ques reprenant la Loi-modèle, préc., sur les « Principes », V. Principes UNIDROIT 2023 - C.D.

(102) 6, Commentaire des Principes, n° 3.6, p. 24.


113 V. supra, I.
114 Une dizaine d’Etats a déjà introduit dans sa législa+on éta+que l’ar+cle 12 du UCC dont, entre autres, la Californie (Cal. Com. Code

§ 12101 et seq.) et le Delaware (Del. Code Ann. +t. 6, § 12-101 et seq.).


25
régula1on, la SEC fait applica1on du Howey test issu de la jurisprudence de la Cour suprême
pour déterminer les ac1fs soumis au droit fédéral des valeurs mobilières115 ;
- Dans l’univers plus général de Common Law d’inspira1on anglaise, une décision de la Cour
suprême de Singapour116 a fait applica1on de la qualifica1on de « choses [ou things] in
ac)on » pour iden1fier parmi les biens117 le stablecoin Tether ayant le dollar comme valeur
de référence, pour déterminer la possibilité d’en assurer la déten1on comme objet d’un
trust118 ;
- Des réflexions d’ampleur ont été menées sous l’égide de la Law Commission au Royaume-Uni
pour iden1fier le concept permeXant d’analyser les ac1fs comme des objets de propriété119.
Dans un récent document soumis à consulta1on jusqu’en mars 2024120 dont les résultats ne
sont pas connus, une proposi1on législa1ve re1ent une qualifica1on générique des choses
« digital in nature » comme objet de propriété121, au-delà de la dis1nc1on en usage entre
things in ac)on et things in possession, issue de la jurisprudence122. L’objec1f de la
proposi1on n’est ainsi pas de définir conceptuellement une troisième catégorie d’objet de
personal property mais d’en admeXre l’existence de manière subsidiaire pour les choses ne
rentrant pas dans la dis1nc1on usuelle123.
- Le droit suisse s’est enrichi du concept de droits-valeurs inscrits, prolongeant celui de
« droits-valeurs », avec la Loi fédérale sur l'adapta1on du droit fédéral aux développements
de la technologie des registres électroniques distribués (FF 2020 7559) ayant introduit les
ar1cles 973d ss Code suisse des obliga1ons, ci-après « CO »).. La qualifica1on concerne
toutes les inscrip1ons dans des registres présentant les aXributs des registres électroniques
distribués124, et qui incorporent des droits vis-à-vis des émeXeurs de façon analogue aux
papiers-valeurs.
- Le Liechtenstein a également forgé une qualifica1on originale de droit civil avec les
« jetons »125 ;

115 La règle de conflit se trouve à la Sec+on 12–107 dont le c), qui suit la méthode des ranachements en cascade. De manière très
simplifiée, celle-ci donne d’abord applica+on à la loi désignée dans le CER, puis à la loi du système dans lequel le CER est enregistré et,
enfin, à la loi du District de Columbia.
116 [2023] SGHC 199, Origina+ng Claim No 320 of 2022 (Summonses Nos 910 and 1526 of 2023), ByBit Fintech Limited v. Ho Kai Xin

and others, spec. §§ 29-39, spéc., §34.


117 §§. 29-33, sur la qualifica+on préalable comme “property”, spéc., §33 : “This descrip+on of crypto assets shows that they can be

defined and iden+fied by modern humans, such that they can be traded and valued as holdings. They certainly meet Lord Wilberforce’s
of-quoted dictum in Na+onal Provincial Bank v Ainsworth [1965] 1 AC 1175 at 1248: Before a right or an interest can be admined into
the category of property, or of a right affec+ng property, it must be definable, iden+fiable by third par+es, capable in its nature of
assump+on by third par+es, and have some degree of permanence or stability”.
118 Plus précisément, d’un « ins+tu+onal construc+ve trust », déterminé même en l’absence de manifesta+on volonté expresse du

cons+tuant.
119 V. Digital Assets: Final Report (2023) Law Com No 412, de la Law Commission, dans le prolongement de la consulta+on lancée en

juillet 2022 : Digital Assets: Consulta+on paper, Law Com No 256, 28 juillet 2022. On men+onnera en parallèle l’unifica+on du régime
des documents électroniques récemment opérée par le Electronic Trade Documents Act 2023 [20th July 2023], 2023.c.38.
120 Law Commission, Digital assets as personal property Short consulta+on on draf clauses, Février 2024.
121 Personal property s’opposant à real property (interest in land).
122 Colonial Bank v Whinney (1885) 30 Ch D 261 at 285, by Fry LJ.
123 V. Digital assets as personal property, préc., pt. 2.24, pp. 8-9: “We have therefore concluded that a thing is not, and should not be,

deprived of legal status as an object of personal property rights merely by reason of the fact that it is neither a thing in ac+on nor a
thing in possession. We recommended the explicit recogni+on, in statute, of a third category of personal property, to encourage a
more nuanced considera+on of new, emergent things. A dis+nct, third category will bener allow the law to focus on anributes or
characteris+cs of the things in ques+on, without being fenered by analysis or principles applicable to other tradi+onal objects of
personal property rights. As discussed below, we consider that such things include, but are not necessarily limited to, crypto-tokens
such as bitcoin”.
124 V. art. 973d, al. 2. CO.
125 Gesetz vom 3. Oktober 2019, über Token und VT-Dienstleister (Token- und VT-Dienstleister-Gesetz; TVTG) (loi sur les tokens et

technologies de confiance) — TVTG, Art. 2 : Defini+ons and designa+ons - 1) For the purposes of this law: a) "trusted technologies
26
- On men1onnera enfin, la loi de Monaco, qui a adopté un disposi1f assez proche de celui issu
de la loi Pacte, excluant de la catégorie des ac1fs numériques les jetons financiers, les deux
étant rassemblés sous la qualifica1on générique de crypto-ac1fs126.

En droit français, le disposi1f issu de la Loi Pacte127 reconnaissant la catégorie des ac1fs
numériques128, a déjà été rappelé129. L’entrée en vigueur du règlement MiCA est appelée à produire
d’importants effets sur celui-ci dont les direc1ons ont été suggérées dans un récent rapport du HCJP,
tout spécialement sur le terrain de la nomenclature des ac1fs rentrant dans le champ d’applica1on
du disposi1f130.
Il n’a donc pas semblé u1le au groupe de travail de par1r des qualifica1ons actuelles du droit interne
dis1nguant les jetons, qualifiés de biens incorporels131 et les autres ac1fs numériques, cons1tuant
une représenta1on d’une valeur et réalisant une fonc1on « d’échange », mais formellement dis1ncts
de la monnaie. Les données de droit substan1el procèdent ainsi davantage des choix opérés par les
disposi1ons du règlement MiCA.
Le rappel des éléments que l’on peut trouver dans le règlement MiCA (i) ouvre la voie à plusieurs
adapta1ons du droit français suscep1ble d’influer sur la qualifica1on (ii).

i. Les données issues du règlement MiCA


Ce texte, d’applica1on directe en droit interne, est ainsi d’abord un texte de régula1on – regulatory
law – établissant des exigences rela1ves à des statuts professionnels et à la réalisa1on de certaines
opéra1ons132. On s’en 1endra ici au rappel des défini1ons et disposi1ons per1nentes du règlement
pour souligner que l’adéqua1on de la règle de conflit procédera de manière nécessaire, pour les
combler, des choix opérés sur le terrain substan1el. Ces éléments ont fait l’objet d’une analyse de
détail dans un rapport déjà cité préconisant les voies d’adapta1on du droit français au règlement
MiCA133.

(VT)": technologies that ensure the integrity of tokens, the clear assignment of tokens to VT iden+fiers and the disposal of tokens; b)
"VT systems": transac+on systems that enable the secure transfer and storage of tokens and the provision of services based on them
using trustworthy technologies; c) "Token": an informa+on on a VT system that: 1. may represent claims or membership rights against
a person, rights to property or other absolute or rela+ve rights; and 2. is assigned to one or more VT iden+fiers (Traduc+on officielle
consultable au lien suivant: hnps://www.gesetze.li/konso/2019301000)
126 n°1528 – Loi du 7 juillet 2022 portant modifica+on de diverses disposi+ons en ma+ère de numérique et réglementa+on des ac+vités

des prestataires de services sur ac+fs numériques ou sur crypto-ac+fs : « ARTICLE PREMIER. Le premier +ret de l’ar+cle premier de la
loi n° 1.383 du 2 août 2011 pour une Principauté numérique, modifiée, est modifié comme suit : « - « ac+f numérique », la
représenta+on sous une forme numérique d’une valeur, d’un bien ou d’un droit de nature patrimoniale. Les ac+fs numériques
comprennent notamment les ac+fs financiers virtuels, les jetons non fongibles et les jetons d’usage, à l’exclusion des jetons financiers
; ». (…)
Est inséré, après le vingt-troisième +ret de l’ar+cle premier de la loi n° 1.383 du 2 août 2011 pour une Principauté numérique, modifiée,
et avant le vingt-quatrième +ret, un nouveau +ret rédigé comme suit : « - « crypto-ac+f », la représenta+on sous une forme numérique
d’une valeur, d’un bien ou d’un droit de nature patrimoniale, comprenant notamment les ac+fs numériques et les jetons financiers ; ».
127 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 rela+ve à la croissance et la transforma+on des entreprises
128 L.54-10-1 du Code monétaire et financier.
129 1.1.
130 Rapport sur le règlement MiCA, préc., pp. 14-16.
131 L.552-1 du Code monétaire et financier.
132 V. en par+culier, son ar+cle premier, paragraphe 1.
133 Rapport sur le règlement MiCA, préc., pp. 33 et s.

27
Le Règlement « MiCA » modifie les concep1ons françaises issues de la loi Pacte rela1ve aux ac1fs
numériques, par une nouvelle nomenclature au sein de la catégorie générale des « crypto-ac1fs »,
définis comme « une représenta)on numérique d’une valeur ou d’un droit pouvant être transférée
et stockée de manière électronique, au moyen de la technologie des registres distribués ou d’une
technologie similaire » (art. 3.1, 5)).
A 1tre liminaire, on rappellera qu’en marge de la défini1on elle-même, la délimita1on du champ
d’applica1on du règlement exclut certains ac1fs, en considéra1on de leurs caractéris1ques134 ou de
l’autorité émeXrice135.
Au-delà, ceXe défini1on a une double portée sur le terrain substan1el.
Elle fonde d’abord une série de défini1ons dans laquelle sont iden1fiées trois catégories de
jetons136 : les « jetons se référant à un ou des ac1fs » ; les « jetons de monnaie électronique », et les
« jetons u1litaires » (ar1cle 3.1.6), 7) et 9)). Il s’agit toutefois d’une classifica1on « secondaire » dans
la mesure où les jetons u1litaires ne sont pas dotés d’un régime juridique propre. Ils ne conduisent
qu’à une adapta1on circonscrite des règles rela1ves aux jetons « autres » que se référant à des ac1fs
ou de monnaie électronique (v. l’Annexe I du Règlement sur le contenu du Livre blanc pour ce type
de jetons). Le plan du règlement propose plus généralement une nomenclature fondée sur une
catégorie résiduelle de défini1on purement néga1ve, celle des crypto-ac1fs « autres » que les jetons
se référant à un ou des ac1fs ou les jetons de monnaie électronique, objet du Titre II, puis les jetons
se référant à un ou des ac1fs (Titre III) et de monnaie électronique (Titre IV).
Ensuite, des éléments de texte déterminant le régime règlementaire de la conserva1on confortent,
sans la commander, une analyse des crypto-ac1fs comme objets de propriété et ainsi, la possibilité
de conduire une analyse sous l’angle du droit des biens. Il en va ainsi de la référence faite à la
propriété et aux droits de propriété par le considérant 82 et par l’ar1cle 70 comme de la terminologie
u1lisée à l’ar1cle 75, rela1ve aux obliga1ons concernant les ac1vités de conserva1on et
d’administra1on. Le paragraphe 1 inscrit parmi les éléments de la conven1on conclue entre le
prestataire de services et le client le droit applicable (g), dont relève en par1culier la mise en œuvre
d’une obliga1on de ségréga1on, qui analyse la conserva1on des crypto-ac1fs en termes de
sépara1on juridique et « fonc1onnelle » des patrimoines, au paragraphe 7137.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les crypto-ac1fs sont incidemment évoqués dans le
règlement MiCA comme des objets de propriété, sans que la qualifica1on ou le régime en soient
déterminés en droit substan1el.

ii. Les pistes d’adapta)on du droit français.


Les concep1ons françaises en droit des biens permeXent sans difficulté la soumission de valeurs
immatérielles au régime juridique des biens, à travers la qualifica1on de biens meubles incorporels.

134 art. 2.3. v. supra, pt. 3.1.1, sur l’exclusion des NFT du champ du présent rapport.
135 Sont concernés les ac+fs numériques émis par les banques centrales agissant en leur qualité d’autorité monétaire, y compris la
monnaie de banque centrale sous forme numérique (cons. 13 ; adde art. art.2.2.c)). Sur l’exclusion des MNBC du champ du rapport, v.
pt. 3.1.1.
136 Par reproduc+on du considérant 18 du Règlement.
137 On relèvera toutefois que, de façon plus descrip+ve, la qualifica+on d’« échange » de crypto-ac+fs contre des fonds ou d’autres

crypto-ac+fs (art. 77) évoque de manière générique une « transac+on » dans sa significa+on d’opéra+on, qu’une qualifica+on de droit
privée. Comp. art. 1702 C.civ. : « L'échange est un contrat par lequel les par+es se donnent respec+vement une chose pour une autre ».
28
A la différence d’autres systèmes juridiques138, le droit français offre ainsi une qualifica1on ouverte
permeXant d’envisager les ac1fs en registres distribués comme des choses appropriables139.
Sans rentrer dans les difficultés liées à la détermina1on des critères d’iden1fica1on des biens en
droit civil, les travaux du groupe de travail ont conduit à soulever plusieurs interroga1ons
suscep1bles d’avoir une influence sur la catégorie de raXachement :
- D’autres ac1fs en registres distribués sont-ils concevables au-delà des crypto-ac1fs du
règlement MiCA ?
- Des dis1nc1ons sont-elles à opérer au sein des crypto-ac1fs régis par le règlement MiCA ?
- Est-il concevable d’envisager une qualifica1on originale, suscep1ble de s’appliquer à
l’ensemble des ac1fs en raison de leur inscrip1on sur support numérique, à la manière dont
ont opéré certains législateurs étrangers ?

3.1.3. AlternaUves et enjeux méthodologiques.


Dans le contexte de l’entrée en vigueur du règlement MiCA, plusieurs méthodes de délimita1on de
la catégorie de raXachement et d’édic1on de la règle de conflit sont possibles (i), alterna1ves
auxquelles il faut ajouter celles rela1ves à l’emplacement de la règle de conflit à bâ1r en fonc1on
des choix de qualifica1on opérés en droit substan1el (ii).
Il a semblé u1le de les rappeler pour pouvoir maîtriser le niveau de complexité du disposi1f
suscep1ble d’en résulter.

i. Les alterna)ves dans l’édic)on de la règle de conflit.


La simplicité peut soit résulter du très faible nombre de règles de conflit, soit de la hiérarchisa1on
des critères.
En fonc1on de l’unicité ou de la pluralité des qualifica1ons et régimes élaborés par le législateur,
essen1ellement deux voies sont concevables :
- L’édic1on d’une règle de conflit unique, ar1culée selon des raXachements alterna1fs ou en
cascade, à la manière du Principe 5 des Principes Unidroit, pour répondre à la difficulté
d’iden1fier un raXachement unique ;
- L’édic1on de plusieurs règles de conflits en fonc1on de différents ac1fs compte tenu de leurs
caractéris1ques.

L’édic1on d’une règle de conflit unique n’est pas en soi exclue par le champ d’applica1on du
règlement MiCA. Celui-ci conduit à dis1nguer trois situa1ons possibles, entre les crypto-ac1fs
rentrant dans son champ d’applica1on, les NFT qui sont exemptés de son applica1on quoi qu’ils
répondent à sa défini1on et d’autres ac1fs ne relevant pas de la défini1on de crypto-ac1fs. Ces
dis1nc1ons ne valent toutefois qu’aux fins de son applica1on comme disposi1f de régula1on.

138V. supra, en par+culier le droit anglais.


139AVANT-PROJET DE RÉFORME DU DROIT DES BIENS, dir. H. Perinet-Marquet, 2008 : « Ar+cle 520 – Sont des biens, au sens de l’ar+cle
précédent, les choses corporelles ou incorporelles faisant l’objet d’une appropria+on, ainsi que les droits réels et personnels tels que
définis aux ar+cles 522 et 523 ».
29
Il demeure toutefois possible d’envisager des dis1nc1ons dans la qualifica1on à donner aux
différents ac1fs. Une pluralité de qualifica1ons est concevable tant pour dis1nguer les ac1fs entrant
dans le champ d’applica1on du règlement MiCA de ceux qui n’y entreraient pas qu’au sein même
des différents crypto-ac1fs concernés par le règlement MiCA.
Pour appréhender la diversité de ces situa1ons, on peut dis1nguer les alterna1ves ouvertes sur le
terrain des qualifica1ons de droit commun et celles résultant de la détermina1on d’un régime
spécifique propre à certains ac1fs.
1° Les qualifica,ons de droit commun
La qualifica1on comme biens incorporels ne contredit pas la leXre du règlement MiCA mais soulève
la difficulté générale d’iden1fica1on du critère de raXachement, qui sera envisagée plus loin, à
défaut de localisa1on évidente. Elle ne suffit pas, en outre, à rendre compte en toute hypothèse du
contenu d’un crypto-ac1f qui selon le règlement MiCA, représente des « droits ou valeurs »140.
En effet, les crypto-ac1fs iden1fiés comme la représenta1on de « droits » à l’encontre d’une en1té
émeXrice cons1tuent des créances, pouvant ainsi conduire à iden1fier la loi applicable par référence
à celle appliquée en ma1ère de cession de créances. En fonc1on de la présence d’un émeXeur, la
qualifica1on de créances ne trouverait à s’appliquer qu’aux seuls crypto-ac1fs émis, représenta1fs
d’un droit, la qualifica1on générique de biens meubles incorporels trouvant alors à s’appliquer aux
crypto-ac1fs non émis, représenta1fs d’une valeur, appelant à déterminer un lieu de situa1on fic1ve,
Or l’iden1fica1on de certains crypto-ac1fs comme des créances pour déterminer le champ de la
règle de conflit paraît inopportune141. En effet, l’analyse conduirait à faire applica1on aux crypto-
ac1fs simplement qualifiés des créances de l’ar1cle 14 du règlement Rome I, laissant en dehors de
la règle de conflit l’importante ques1on de l’opposabilité aux 1ers142.
Selon le droit commun, la soumission des crypto-ac1fs représenta1fs d’un droit à la qualifica1on de
créances conduit à l’applica1on des disposi1ons de l’ar1cle 14 du règlement Rome I qui demeure
faiblement adapté en l’absence de principe clair de solu1ons sur le terrain de la loi applicable à
l’opposabilité aux 1ers143.
2° Les qualifica,ons originales
Des qualificaUons originales de portée plus ou moins étendue peuvent se présenter, en l’état des
réflexions menées. Le groupe de travail a relevé, à 1tre liminaire, le risque d’une démul1plica1on
des problèmes d’interpréta1on des règles de conflit à la mesure du nombre de qualifica1ons et de
dis1nc1ons proposées entre les ac1fs.

140 Règlement MiCA, ar+cle 3.1(5).


141 Comp. constatant l’inadéqua+on en droit substan+el de l’applica+on du régime de la circula+on des créances du Code civil et les
incer+tudes entourant les modalités du transfert de propriété, le Rapport sur le règlement MiCA, préc., pp. 26-30.
142 Lecture confortée par la CJUE : BGL BNP Paribas c/ TeamBank AG Nürnberg, aff. C-548/18, 1er ch., 9 oct. 2019 : « L’ar+cle 14 du

règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obliga+ons contractuelles
(Rome I) doit être interprété en ce sens qu’il ne désigne pas, de manière directe ou par analogie, la loi applicable concernant
l’opposabilité aux +ers d’une cession de créance en cas de cessions mul+ples d’une créance par le même créancier à des cessionnaires
successifs ». L’opposabilité aux +ers se prête, en droit comparé, aux ranachements les plus variés : loi applicable au contrat de cession,
à la créance cédée, au domicile du cédant ou du cédé.
143 En réservant les travaux en cours sur la Proposi+on de règlement sur la loi applicable à l’opposabilité des cessions de créances,

préc.
30
- Dans les pas de certains droits étrangers, elles peuvent résulter d’une qualifica1on originale
de droit civil ou de droit des biens, à la manière du droit suisse.

Il est alors concevable d’adopter une règle de conflit propre à la qualifica1on envisagée, allant au-
delà de la typologie et du champ d’applica1on du règlement MiCA, pour inclure par exemple les NFT,
prenant en compte la diversité des ac1fs ainsi visés en termes de raXachement.
- Dans le contexte du règlement MiCA, la qualifica1on de crypto-ac1fs pourrait elle-même
cons1tuer une catégorie de raXachement. Leur soumission à un régime unique en droit
substan1el appellerait ainsi une règle de conflit unique. CeXe approche aurait pour avantage
sa conformité au droit de l’Union, jusque dans le respect des exclusions du règlement MiCA
lui-même. Elle main1ent ainsi l’intérêt de conduire une réflexion spécifique sur les monnaies
numériques émises par les banques centrales (MNCB), exclues de la no1on de crypto-ac1fs
dans le règlement MiCA, aux fins de l’élabora1on d’un instrument interna1onal dédié144.
Ce choix aurait une double incidence. Il conduirait, d’une part, à envisager dans deux règles de conflit
dis1nctes, la détermina1on de la loi applicable aux crypto-ac1fs couverts par le règlement MiCA et
aux crypto-ac1fs exemptés ou autres « crypto-ac1fs » ne relevant pas de la défini1on du règlement.
Ce choix emporterait, d’autre part, la détermina1on de raXachements permeXant d’appréhender la
diversité des crypto-ac1fs couverts par le règlement MiCA. Ainsi qu’il sera évoqué, les crypto-ac1fs
du règlement MiCA n’offrent pas tous les mêmes critères de raXachement objec1fs. Ce dernier
inconvénient peut être réduit si l’on parvient à simplifier l’architecture pour s’en tenir à une
dis1nc1on unique entre deux catégories de jetons, un exemple étant cons1tué par le critère de
l’émission.
Comme variante de ceXe voie fondée sur les qualifica1ons du règlement MiCA, un récent rapport
déjà men1onné suggère une qualifica1on plus fine déduite de la soumission de certains ac1fs à un
régime de propriété par1culier145. Ainsi en irait-il des crypto-ac1fs soumis à un régime ad hoc inspiré
de celui des 1tres financiers négociables dans le cas précis où ceux-ci ont été soumis à la garde ou
au contrôle d’un conservateur146. Il y aurait donc lieu, jusque dans le contexte du règlement MiCA,
de dis1nguer deux régimes applicables aux crypto-ac1fs : un régime ad hoc en présence d’un
conservateur et un régime reposant sur des qualifica1ons de droit commun.
A l’instar du rapport men1onné, le groupe de travail observe que la proposi1on implique « un choix
de poli1que juridique »147 qui n’est pas neutre en droit substan1el. Il suppose l’iden1fica1on d’une
modalité de transfert de propriété associée au contrôle suscep1ble d’être exercé par un 1ers de
confiance, marquant ainsi une volonté de réintermédia1on de la ma1ère148 comme condi1on au
bénéfice d’un régime de protec1on pour les inves1sseurs. De la sorte, l’élément essen1el du
règlement MiCA, condi1onnant la détermina1on du régime de droit privé applicable aux crypto-

144 CGAP 2024 MARCH 2024 PREL. DOC. NO 4, Exploratory Work: Private Interna+onal Law Aspects of Central Bank Digital Currencies

(CBDCs), spec., §8-16, p. 3-7.


145 Rapport sur le règlement MiCA, préc., pp. 30-33.
146 Ibid. Il s’agit de remédier ainsi aux incer+tudes entourant l’applica+on du droit commun des biens incorporels conduisant à des

incer+tudes en termes de modalités du transfert de propriété, d’étendue de la protec+on du possesseur du bonne foi ou encore de
saisissabilité des crypto-ac+fs à défaut d’en+ercement.
147 Rapport sur le règlement MiCA, préc., p. 32.
148 Pour l’heure, les modalités du transfert sont renvoyées à un choix à effectuer par le RG AMF entre inscrip+on dans le registre

distribué ou dans le registre de posi+on tenu par l’intermédiaire : Rapport sur le règlement MiCA, préc., p. 31.
31
ac1fs 1ent à la présence d’un intermédiaire en par1culier parmi tous les professionnels concernés
qui serait le conservateur.
Les conséquences induites paraissent être les suivantes.
En premier lieu, ce choix rompt sur le terrain substan1el l’unité de la catégorie des crypto-ac1fs.
Leur régime se trouverait divisé formellement entre les règles d’un régime emprunté aux 1tres
négociables, an1cipé dans un Code spécial, le Code monétaire et financier, et celui à déduire des
qualifica1ons de droit commun du Code civil.
En second lieu, ceXe dis1nc1on peut avoir une influence sur le critère de raXachement. Des
dis1nc1ons demeurent concevables entre les crypto-ac1fs selon, par exemple, qu’ils sont émis ou
non149. Cependant, dès lors que la déclinaison du régime des 1tres négociables, commandant les
modalités du transfert de propriété ou la protec1on du détenteur inscrit, repose sur la présence d’un
intermédiaire, ce régime ad hoc invite à adopter comme critère de raXachement pour les crypto-
ac1fs qui en relèvent la loi régissant l’ac1vité du conservateur. Ce critère invite donc formellement à
l’édic1on d’un autre critère pour les crypto-ac1fs qui ne font pas l’objet d’un service de conserva1on.
Il en résulte que l’édic1on d’une règle de conflit unique n’est pas forcément adaptée. Il en résulte
également que le choix effectué sur le terrain substan1el, d’associer des règles protectrices sur le
terrain du droit des biens à la présence d’un conservateur peut être exprimé de différentes
manières :
- Il est possible d’en faire un critère de raXachement dans une règle bilatérale, en déterminant
l’applica1on de la loi du conservateur ;
- Il est également possible, dans le souci de déterminer l’applica1on d’un disposi1f français
d’aspira1on protectrice, d’en faire une règle unilatérale, déterminant l’applica1on du droit
français aux crypto-ac1fs gardés ou contrôlés par les conservateurs situés en France.

Enfin, de manière encore plus étroite, il est concevable de soumeXre à une règle de conflit spéciale
certains ac1fs iden1fiés selon une qualifica1on par1culière, compte tenu de leur objet par1culier.
Tel pourrait être le cas, par exemple, d’une règle de conflit spécifiquement établie pour tenir compte
des règles de droit monétaire applicable à la monnaie éta1que prise par référence par un stablecoin,
qu’il s’agisse d’un « jeton se référant à un ou des ac1fs », pouvant combiner plusieurs valeurs de
référence, ou d’un « jeton de monnaie électronique » prenant exclusivement pour référence une
monnaie éta1que, au sens du règlement MiCA.
Envisageant la situa1on des stablecoins en par1culier, il a semblé au groupe de travail qu’elle pouvait
plus opportunément être envisagée au stade de la détermina1on de la portée de la loi applicable
aux ac1fs, qui sera considérée ci-après150.

149 Sur le critère de l’émission, v. infra, 3.2.2.


150 V. infra, 3.3.
32
ii. Les alterna)ves rela)ves à l’emplacement de la règle de conflit
L’analyse conduite des ac1fs sur le terrain substan1el est suscep1ble d’influer sur la réflexion rela1ve
à l’emplacement de la règle de conflit de lois. En l’aXente des choix d’adapta1on à opérer, seules les
principales alterna1ves sont ici rapidement évoquées.
Selon un raisonnement par analogie avec le droit des 1tres, les règles de conflit applicables aux
crypto-ac1fs pourraient se trouver dans le code spécial déterminant les règles rela1ves à leur régime
de propriété. Cela n’est toutefois pas une nécessité et dépendra d’une réflexion de droit substan1el
sur ce que sont les crypto-ac1fs et leur analyse selon le droit commun ou selon un régime ad hoc.
Toutefois, pour l’hypothèse d’un régime ad hoc ne s’appliquant qu’aux ac1fs objet d’un service de
conserva1on, la localisa1on de la règle de conflit pour les autres ac1fs soulève une difficulté de
lisibilité appelant une coordina1on, par le jeu d’éventuels renvois de textes entre le code spécial
édictant le régime ad hoc et la règle de conflit propre aux ac1fs conservés et les autres ac1fs, relevant
d’un autre régime et soumis à une loi propre.
En revanche, l’établissement de règles substan1elles reposant sur une qualifica1on originale par
rapport à celle du règlement MiCA, à l’image des droits-valeurs inscrits du droit suisse, pourrait
conduire à un autre emplacement151. Dans un souci de lisibilité, il est adapté que la règle de conflit
se trouve au sein du disposi1f déterminant le cadre substan1el, qu’il s’agisse d’une loi spéciale ou
d’un code, tel le Code civil.
Il n’est pas exclu, là encore, d’introduire aux fins de coordina1on une disposi1on de renvoi dans les
codes spéciaux traitant d’autres aspects des ac1fs en ques1on tel, par exemple, une disposi1on du
code monétaire et financier renvoyant pour la détermina1on des effets patrimoniaux des crypto-
ac1fs, à la règle de conflit figurant dans une loi spéciale en la ma1ère.

3.2. Détermina:on du raHachement.

Au nombre des réflexions déjà conduites, une étude synthé1que d’un grand nombre de
raXachements envisageables a été réalisée par le Financial Markets Law CommiKee152 (FMLC), en
mars 2018, et reproduite dans un document de travail sous forme de tableau par le bureau
permanent de la HCCH153. Sans en discuter intégralement le contenu, le groupe de travail s’est
concentré sur les principaux rattachements proposés pour déterminer ceux qui paraissaient non
pertinents (3.2.1.) et ceux qui pouvaient être retenus (3.2.2).

3.2.1. Ra_achements exclus.

151 A la mesure de sa généralité, il n’est pas exclu de l’intégrer dans un futur code de droit interna+onal privé si le projet en discussion

devait s’enrichir de développements consacrés aux droits et biens incorporels au-delà des droits de propriété intellectuelle, objets des
ar+cles 105 et 106 du Projet.
152 Distributed Ledger Technology and Governing Law: Issues of Legal Uncertainty, March 2018.
153 CGAP 2021 MARCH 2021 PREL. DOC. NO 4, Developments with respect to PIL implica+ons of the digital economy, including DLT.

33
i. La loi d’autonomie
Le raXachement fondé sur la loi d’autonomie appelle une brève analyse, en par1culier compte tenu
des réflexions en cours au niveau interna1onal.
Le groupe de travail a relevé son emploi, selon des modalités variables, dans différents instruments
conven1onnels, jusque dans le champ des droits réels largement entendu154. Sa per1nence
théorique a priori pour remédier à la difficulté d’iden1fica1on de raXachements objec1fs ne paraît
pas soulever d’objec1on de principe ou d’ordre dogma1que.
Il a en outre été envisagé dans la première par1e de ce rapport, au point 1.3, les difficultés
d’interpréta1on de l’exigence règlementaire posée par le règlement MiCA d’indica1on dans le Livre
Blanc de la loi applicable à l’offre et du droit applicable aux crypto-ac1fs, dans laquelle il n’a pas paru
per1nent au groupe de travail d’iden1fier une règle de conflit cachée désignant la loi d’autonomie,
MiCA n’étant pas un texte de droit privé.
Dans la perspec1ve de l’élabora1on d’un texte interna1onal, il est toutefois nécessaire d’approfondir
la réflexion sur les prémisses des Principes Unidroit pour déterminer si celles-ci peuvent demeurer
adéquates à l’élabora1on d’une règle de conflit pour les ac1fs numériques, au-delà des 1tres
financiers.
Selon une structure de raXachement en cascade déjà évoquée155, le Principe 5 iden1fie comme
raXachement principal la loi désignée dans l’ac1f lui-même par le 1tulaire, puis celle désignée dans
la plateforme et enfin de manière objec1ve, celle de l’émeXeur. Ces trois raXachements principaux
sont complétés par l’applica1on des principes par le juge saisi et, à défaut encore, ses propres règles
de conflit. Fondamentalement, la loi d’autonomie est retenue comme le seul critère de raXachement
adapté pour englober l’ensemble des ac1fs qui peuvent prendre la forme d’un « ac)f numérique »,
les autres sous-critères étant analysés comme con1ngents156 : il n’existe pas toujours d’opérateur de
la plateforme ; les crypto-ac1fs ne résultent pas toujours d’une émission et donc, d’un émeXeur. Le
choix d’un raXachement de principe fondé sur la loi d’autonomie par les Principes Unidroit procède
du constat de l’absence de raXachement objec1f suffisamment convaincant pour s’appliquer dans
leur diversité à l’ensemble des crypto-ac1fs.
Le choix de la loi d’autonomie (Chosen law of the transac)on/transfer/assignment) présente en lui-
même certaines imperfec1ons qui ont déjà été soulignées, tenant à la difficulté d’iden1fier la loi
applicable pour trancher des conflits entre sous-acquéreurs, à la difficulté pra1que d’établir l’accord
des par1cipants à un système sur la loi applicable et, plus généralement, à la fragmenta1on de la loi
applicable aux différents ac1fs enregistrés au sein d’un même registre 157 et au cours du temps. Le
principe 5.2.e) des principes Unidroit admet le changement de loi applicable sous réserve du
main1en de la loi antérieure pour les droits acquis avant ceXe modifica1on : « (e) if, aier a digital

154 Ainsi, la Conven+on du 1er juillet 1985 rela+ve à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance (XVe Session) n’exige pas de lien

par+culier entre la loi choisie par le cons+tuant et le trust (art. 6), tandis que Conven+on déjà citée du 5 juillet 2006 sur la loi applicable
à certains droits sur des +tres détenus auprès d'un intermédiaire (XIXe Session) requiert un lien entre la loi désignée dans la conven+on
de compte et l’intermédiaire per+nent (art. 4).
155 V. supra, I.2.
156 Pt. 5.4 de la note explica+ve : “Principle 5 recognises that the usual connec+ng factors for choice-of-law rules (e.g. the loca+on of

persons, offices, ac+vity, or assets) usually have no useful role to play in the context of the law applicable to proprietary issues rela+ng
to digital assets. Indeed, adop+on of such factors would be incoherent and fu+le (except in the limited case where there is an iden+fied
issuer, see Principle 5(1)(c)) because digital assets are intangibles that have no physical situs”.
157 CGAP 2021 MARCH 2021 PREL. DOC. NO 4, Prec., p. 9.

34
asset is first issued or created, the applicable law changes by opera)on of paragraph (1)(a), (1)(b) or
(1)(c), proprietary rights in the digital asset that have been established before that change are not
affected by it ». Si l’on peut retenir qu’en vertu de la hiérarchie des raXachements, il est possible de
privilégier la loi désignée dans le système d’enregistrement à celle de l’émeXeur, la loi choisie dans
l’ac1f à celle du système, l’inverse est-il admissible ? Quelle portée faut-il reconnaître à la nécessité
de soumeXre les ac1fs de même nature à une loi unique ? Le main1en de la loi ancienne peut ainsi
conduire à terme à une fragmenta1on de la loi applicable pour un même ac1f ; la reconnaissance
du principe d’autonomie va en outre, au fil du temps, fragmenter la loi ini1alement applicable à une
même émission.
A ce défaut de fragmenta1on de la loi applicable s’ajoutent de nombreuses incer1tudes de mise en
œuvre de principe, dans le champ du règlement MiCA. La sépara1on formelle entre les ques1ons de
droit privé et les ques1ons réglementaires (regulatory law) sur laquelle reposent les Principes
Unidroit158 ne permet pas de résoudre un certain nombre de difficultés liées à la mise en œuvre de
la loi d’autonomie dans un certain contexte réglementaire.

Elle est dis1ncte de son expression dans le champ contractuel puisqu’elle procède d’un choix
unilatéral du « 1tulaire » dont les modalités pra1ques demeurent incertaines. La solution de
principe, résultant du choix de la loi dans l’actif lui-même, paraît peu convaincante en pratique. Sa
mise en œuvre technique demeure incertaine car le choix unilatéral de la loi applicable par le
détenteur n’est pas aisé à généraliser. En outre, il est nécessairement contingent et appelle, à défaut
de choix, la nécessité de détermination d’un critère objectif.

Ces difficultés s’étendent aux alterna1ves fondées sur la volonté des par1cipants sous la forme d’une
loi déterminée entre eux et valable au sein d’un réseau – elec)ve situs159 ou modified elec)ve situs :
- Comment s’opère la détermina1on unilatérale de la loi applicable à un objet de propriété ?
A quelles condi1ons l’acquéreur poten1el en serait-il alors informé160 ?
- Dans le contexte de MiCA, faudrait-il admeXre la soumission des crypto-ac1fs à la loi
d’autonomie ? A quelles condi1ons ? Pourrait-on privilégier la loi déterminée par les
par1cipants entre eux ou le seul exploitant de la plateforme de négocia1on161 ? Comment
serait admise ou écartée la possibilité d’un changement de loi applicable à un ac1f ou à la
plateforme en cours d’ac1vité ?
Pourrait-on alors privilégier le sous-critère d’Unidroit identifié dans la loi du système ?

En résultent plusieurs incertitudes dans le contexte du règlement MiCA. Cette loi doit-elle être
déterminée par les participants entre eux ou, unilatéralement, par le seul opérateur de la
plateforme de négociation ? Comment serait admise ou écartée la possibilité d’un changement de
loi applicable à un actif ou à la plateforme en cours d’activité ?

158 Spéc., pt. 0.9 et 1.1 des Principes.


159 CGAP 2021 MARCH 2021 PREL. DOC. NO 4, p. 8.
160 "V. le rapport de la commission des lois britanniques, « Smart legal contracts Advice to Government », nov. 2021, spéc. n° 7.71 et

s., p. 183 et s. (« Expressing a choice of law in code »), spec. n° 7.74, p. 184: « it is very difficult for par+es to express a choice of law
clause in code, whereby code we mean opera+onal, determinis+c code ».
161 V. l’art. 3.1. 16), b), incluant dans les services sur crypto-ac+fs « l’exploita+on d’une plate-forme de négocia+on de crypto-ac+fs ».

35
En somme, la simplicité voulue dans la détermination du rattachement génère de nombreuses
complications pour la rendre possible sur le terrain réglementaire.

Le groupe de travail a ainsi observé que, bien qu’il n’ait pas en vue des quesUons de droit privé, la
coordinaUon entre les impéraUfs du règlement MiCA, faisant intervenir des prestataires régulés,
et la mise en œuvre de la loi d’autonomie suscite des quesUonnements de mise en œuvre et
appelle un nombre important de précisions au point de rendre la déterminaUon de la loi applicable
parUculièrement complexe selon les hypothèses.
Ainsi, la séparaUon radicale voulue par les principes Unidroit entre les quesUons de droit privé et
les quesUons de regulatory law ne suffit pas à voir dans le choix de la loi d’autonomie un critère
de simplificaUon.

ii. Les critères technologiques


Un certain nombre de critères envisagés par le Financial Markets Law CommiXee peuvent être
écartés, en raison de leur dimension plus technologique que juridique. Il en va ainsi de la Lex codicis,
loi de résidence du programmeur, loi de situation du détenteur de la clé maîtresse (PREMA - Primary
Residence of the Encryption Private Master keyholder162).
En outre, ces critères présentent l’inconvénient de s’appuyer sur certaines modalités de concep1on
et de fonc1onnement technique des registres qui contreviennent sur le terrain du raXachement au
principe de neutralité technologique.

iii. Les raKachements générateurs de conflits mobiles


D’autres encore, bien qu’ayant une aXache plus forte avec l’exercice des droits sur crypto-ac1fs, sont
intrinsèquement défectueux en raison de la difficulté de les déterminer in concreto et de leur
variabilité, génératrice de conflits mobiles et, en par1culier, le lieu de la clé privée.
Ainsi en va-t-il également, dans une moindre mesure, du critère du lieu où se trouve le
« participant »163, adopté par les juridictions anglaises164.
S’il est nécessaire à titre purement subsidiaire à défaut de tout autre rattachement déterminable,
la localisation du participant présente une insuffisance logique importante, en particulier dans le
contexte d’une action en revendication. La règle de conflit doit précisément déterminer qui est le
propriétaire de sorte que déterminer la loi applicable en fonction de la résidence de celui qui affirme
son droit est un raisonnement circulaire. Il soulève, en outre, plusieurs incertitudes165, quant à sa
mise en œuvre pratique en termes de traçabilité comme de technique juridique, pour déterminer,
au sein d’une chaîne translative, les droits effectivement acquis par le demandeur166.

162 PREMA - Primary Residence of the Encryp+on Private Master keyholder


163 Loca+on of the Par+cipant/Transferor/(User) Private Encryp+on Key
164 Tulip Trading Ltd v Bitcoin Associa+on for BSV [2022] EWHC 667 (Ch) (Tulip Trading v Bitcoin).
165 Dont en par+culier celle, tradi+onnelle en droit interna+onal privé, de son accep+on, entre domicile et résidence.
166 CGAP 2021 MARCH 2021 PREL. DOC. NO 4, p. 10: “A significant disadvantage is that this rule gives no clear answer to ques+ons of

en+tlement where there are: joint transferors, chains of assignments, or change in habitual residence by the transferor”.
36
Il présente cependant un autre avantage important, outre son applicabilité à défaut de tout autre
rattachement objectif dans le cadre d’une demande en justice. Il est en effet susceptible de
s’appliquer également, au-delà des questions relatives aux effets patrimoniaux, en particulier dans
la détermination de la juridiction compétente et de la loi applicable aux actions indemnitaires. La
mise en cohérence des rattachements sur ces différentes questions est susceptible de constituer un
élément de simplicité et de cohérence du point de vue du détenteur.

iv. Loi de la créance fondamentale


Ainsi qu’il a été évoqué plus haut au sujet de la délimita1on d’une catégorie de raXachement167,
l’approche fondée sur l’applica1on du régime des créances aux crypto-ac1fs paraît faiblement
opératoire168 et se heurte au fait que certains crypto-ac1fs représenta1fs de « valeurs » et générés
sans aucune en1té émeXrice ne peuvent être analysés comme des créances. Or le raisonnement en
termes de loi de la créance fondamentale suppose de manière exacte son applica1on à des créances.

3.2.2. Ra_achements considérés : loi de l’éme_eur et loi du conservateur.


A l’examen, les deux critères qui ont paru les plus pertinents, sont la loi dont relève l’émetteur et
celle dont relève le conservateur (i). Ces deux critères étant contingents, il paraît nécessaire
d’identifier leur hiérarchie et de les compléter par un critère subsidiaire, sous forme d’une règle de
conflit conçue en cascade (ii).

i. Jus)fica)ons et limites
Les deux critères qui sont apparus les plus per1nents étaient cons1tués par la loi de l’émeXeur et
celle du conservateur. Il faut observer que ces deux critères limités par hypothèse à la détermina1on
des effets patrimoniaux, ne neutralisent pas la liberté de choix pour le détenteur de recourir au
service d’un conservateur non régulé ou d’acquérir des ac1fs auprès d’un émeXeur situé dans un
paradis fiscal169.
L’objet de la règle de conflit examinée, limitée à la reconnaissance et aux condi1ons d’exercice des
droits de propriété, n’implique cependant pas la détermina1on d’un raXachement dans une
perspec1ve purement régulatrice. Il demeure possible en toute hypothèse d’invoquer à l’encontre
de la loi désignée en vertu de ces raXachements le mécanisme général d’évic1on de la loi applicable
cons1tué par l’excep1on d’ordre public, ainsi que l’excep1on de fraude à la loi, permeXant d’en
rendre les effets inopposables.

La loi de l’émetteur constitue un rattachement pertinent pour déterminer le droit applicable aux
cryptoactifs. D’un point de vue théorique, ses justifications sont différentes de celles susceptibles

167 V. supra. 3.1.2.


168 En l’état, l’applica+on de cene loi a été envisagée, selon une terminologie aujourd’hui caduque, pour les créances résultant de
crypto-ac+fs autres que les instruments financiers ou de monnaie électronique, aux fins de l’opposabilité aux +ers dans le document
déjà cité Proposal for a Regula+on of the European Parliament and of the Council on the law applicable to the third-party effects of
assignments of claims - 4 column table”, du 3 décembre 2021, p. 140.
169 Possibilité couramment désigné comme un « risque d’arbitrage réglementaire ».

37
d’être proposées en droit des instruments financiers. L’émetteur n’intervient plus ici comme teneur
de registre, ainsi qu’il en va pour les titres financiers nominatifs170.

Ce critère a déjà pu être utilisé en droit comparé par la loi du Liechtenstein171 à titre de rattachement
principal alternatif à la loi d’autonomie. Il constitue en outre un rattachement subsidiaire même
dans les dispositifs posant comme rattachement de principe la loi d’autonomie en retenant
l’application de la loi désignée dans l’actif, à l’instar du droit suisse172, ou des Principes Unidroit173.

Si le rattachement au compte, permettant l’identification de l’intermédiaire a du sens lorsqu’existe


une chaîne d’intermédiation, les crypto-actifs n’en sont pas l’objet. Entre l’investisseur et
l’émetteur, il n’y a à titre de principe qu’un seul niveau d’intermédiation. S’agissant d’un
rattachement aisément identifiable dans la majorité des situations, la loi de l’émetteur paraît
adaptée à la relation.

Il y a lieu d’observer que le critère de l’émission présente comme principale limite celui d’être
naturellement inapplicable pour les cryptoactifs non émis, qui n’ont pas d’actifs de référence, tels
que le Bitcoin. En outre, à l’occasion de la constitution d’un portefeuille par un investisseur, il
conduit à une nécessaire fragmentation de la loi applicable, générant par voie de conséquence des
difficultés dans la délimitation de sa portée au regard de la constitution et de l’opposabilité des
sûretés174. Enfin, dans le contexte de la crypto-économie, une difficulté supplémentaire peut
résulter de la détermination du rattachement à l’émetteur lui-même. Cette difficulté doit cependant
être relativisée compte tenu de la reconnaissance progressive par des lois spéciales de formes
juridiques conférant un statut aux DAOs175.

La loi du conservateur a également paru constituer un rattachement adapté pour différentes


raisons. Formellement, la définition de la conservation qui résulte de l’article 3.1, 17)176 renvoie à
des activités plus ou moins étendues du conservateur qui toutes rendent compte d’une maîtrise du
conservateur sur les actifs, sans nécessité de distinguer entre ces activités en fonction de la
convention particulière conclue entre les parties. Le rattachement à la loi du conservateur satisfait

170 V. supra, 2.2.2.


171 Comp. loi du Liechtenstein : Token und Vertrauenswürdige Technologien Gesetz (loi sur les tokens et technologies de confiance) —
TVTG, préc., dans laquelle figure une règle de conflit unilatérale, qui peut facilement être bilatéralisée : « Ar+cle 3 Subject and scope
1) This chapter regulates the civil law qualifica+on of tokens and their disposal on VT systems. 2) It applies if: 16 a) tokens are placed
on the market or issued by a TT service provider based or resident in Germany; b) par+es in a legal transac+on involving tokens
expressly declare its provisions to be applicable; or c) Tokens are used in legal transac+ons by a natural or legal person with residence
or registered office in Germany. 3) Ar+cles 4 to 6 and 9 also apply muta+s mutandis to tokens that do not represent rights”.
172 L’ar+cle 145a de la Loi sur le droit interna+onal privé suisse (ci-après, la LDIP) dispose ce qui suit : « 1 Le droit désigné dans un +tre

revêtant la forme d’un papier ou une forme équivalente détermine si ce +tre représente une créance et si le transfert de la créance se
fait par l’intermédiaire de ce +tre. À défaut d’une telle désigna+on, la ques+on est régie par le droit de l’État dans lequel l’émeneur a
son siège ou, faute de siège, sa résidence habituelle. 2 En ce qui concerne les droits réels rela+fs à un +tre physique, les disposi+ons
du chapitre 7 sont réservées. » L’art. 145a LDIP s’applique en outre non seulement aux papiers-valeurs tradi+onnels mais aussi à leurs
équivalents qui ne revêtent pas la forme d’un papier, et notamment aux jetons similaires aux papiers-valeurs dans un système de
blockchain.
173 Art. 5.1.c).
174 V. infra, 3.3.2.
175 V. la présenta+on du développement des lois spéciales déterminant les « enveloppes juridiques » – Legal Wrappers – des DAOs dans

le Rapport du HCJP sur la récep+on des organisa+ons autonomes décentralisées en droit français, à paraître.
176 «conserva+on et administra+on de crypto-ac+fs pour le compte de clients»: la garde ou le contrôle, pour le compte de clients, de

crypto-ac+fs ou des moyens d’accès à ces crypto-ac+fs, le cas échéant sous la forme de clés cryptographiques privées ».
38
en outre le besoin de sécurité juridique. Aux termes du règlement MiCA (spéc., art. 75), le
prestataire qui rend un service de conservation ne laisse pas de doute à l’investisseur quant au fait
que les cryptoactifs sont réputés conservés par le conservateur agréé, même en cas de sous-
conservation, dans une logique de lisibilité et de sécurité juridique. L’investisseur pourra aisément
déterminer les droits attachés à son actif et s’attendre à leur soumission à la même loi que celle
régissant les autres actifs conservés.

Ce critère est également cohérent avec les principes de solution traditionnels du droit des titres,
réputant la localisation des titres au lieu de situation du TCC pour les titres au porteur. En effet, ainsi
qu’il a été souligné plus haut, en droit des titres, l’application de la loi de l’émetteur est
fréquemment justifiée pour les titres nominatifs en raison de l’activité de tenue de compte réalisée
par l’émetteur. En elle-même, la loi de l’émetteur est plus pertinente pour déterminer les droits nés
des actifs que les effets des opérations réalisées sur les crypto-actifs.

Ce critère présente toutefois différents inconvénients. Il est d’abord con1ngent. Le recours à un


intermédiaire ne cons1tue pas une obliga1on en l’état de la réglementa1on, en cohérence avec la
technologie de registre distribué, conçue pour désintermédier les rapports d’inves1ssement et de
paiement. A cet égard, l’analogie avec le droit des 1tres rencontre des limites. Le raXachement au
conservateur paraît adapté à la détermina1on des droits et effets des transac1ons dans un contexte
nécessairement intermédié, mais l’est moins lorsque ceXe intermédia1on devient un élément
con1ngent.

Ensuite, l’avantage perçu par l’inves1sseur de l’unité de la loi applicable peut être rela1visé compte
tenu du cadre règlementaire applicable à l’ac1vité de conserva1on résultant du règlement MiCA. La
préoccupa1on essen1elle de l’inves1sseur procède des obliga1ons du conservateur en termes de
maîtrise et de res1tu1ons des ac1fs, dans le cadre désormais fixé par des disposi1ons d’ordre
public177. Il en résulte que la pluralité des lois applicables est un élément de complexité pour les
conservateurs, qui n’aggrave pas intrinsèquement la posi1on de l’inves1sseur. Le raXachement au
conservateur unifie les paramètres d’exécu1on de certaines de ses obliga1ons mais n’en modifie pas
véritablement la teneur à l’égard de l’inves1sseur.
Enfin, en l’état des solu1ons observables retenues par des législa1ons étrangères, le choix de la loi
du conservateur n’est pas encore largement retenu. La poli1que législa1ve généralement suivie
consiste bien à déterminer la loi applicable en fonc1on d’une logique de marché étrangère à toute
intermédia1on. L’adop1on d’un tel raXachement à 1tre de principe ne paraît pas nécessairement
adaptée à la détermina1on des effets patrimoniaux. Il a toutefois été observé qu’un tel raXachement
serait de nature à mesurer ses conséquences opéra1onnelles par rapport aux autres systèmes
juridiques ne retenant pas ce critère comme raXachement.

ii. Conséquences
L’analyse des avantages et inconvénients des deux critères de raXachement envisagés conduit à
conclure à la nécessité d’une règle de conflit hiérarchisée. Tant le critère de conserva1on que celui
fondé sur la présence d’un émeXeur, conduisent à des soluUons incomplètes dans la détermina1on

177 V. l’ar+cle 75, 7, alinéa 2, du règlement MiCA., préc. Comp. le Principe 13 des Principes Unidroit.
39
de la loi applicable. Le critère de la conserva1on suppose la présence d’un intermédiaire qui n’est
pas toujours sa1sfaite en pra1que, tandis que le critère de l’émission ne permet pas d’iden1fier la
loi applicable aux cryptoac1fs non-émis.
Quel que soit le critère de principe retenu, il est en outre nécessaire de le compléter par un
raXachement plus subsidiaire encore pour l’hypothèse d’ac1fs non émis et non intermédiés. En
dépit des imperfec1ons dont il fait l’objet178, le critère nécessairement sa1sfait à l’occasion d’une
demande en jus1ce est celui de la résidence principale du détenteur, lors de la soumission de sa
demande179.
Le groupe de travail a ainsi été de l’avis unanime qu’une règle de conflit unique, fondée sur des
raXachements en cascade était souhaitable, inscrivant à 1tre de raXachement très subsidiaire la
résidence habituelle du détenteur, suscep1ble d’être adapté selon le critère du centre des intérêts
principaux ou de l’administra1on centrale pour les personnes morales.
En revanche, il n’y a pas eu de consensus sur l’ordre des critères principaux, cons1tués par la loi de
l’émeXeur et celle du conservateur et sur la nécessité de privilégier, en l’état de la réflexion, l’énoncé
d’une règle.
A l’étude, il était apparu que deux règles concurrentes étaient suscep1bles d’être formulées :
- L’une érigeant en premier raXachement la loi du conservateur, puis, à défaut, celle de
l’émeXeur, et enfin, de façon très subsidiaire, celle de résidence habituelle du détenteur ;
- L’autre, érigeant en premier raXachement la loi de l’émeXeur, puis, à défaut, celle du
conservateur, et enfin, de façon très subsidiaire, celle de résidence habituelle du détenteur.

Sur cette question, une minorité des membres du groupe de travail a insisté sur l’importance de la
question en termes de politique juridique, compte tenu de la place ainsi donnée au conservateur
dans la détermination du rattachement. Ces membres ont été d’avis qu’il était prématuré d’émettre
une proposition en faveur de l’une ou l’autre alternative et préférable d’ouvrir des pistes possibles
de solutions aux conflits de lois par l’énoncé de deux règles possibles, dont une, rendant applicable
à titre principal la loi de l’émetteur, aux côtés d’une règle reposant à titre de principe sur le
rattachement à la loi du conservateur.

La première règle suivrait la structure suivante :


1° Les conditions et effets patrimoniaux des actifs inscrits en registres distribués représentant un
droit à l’encontre d’une entité émettrice sont régis par la loi de l’émetteur.
2° Dans l’impossibilité d’établir la loi applicable à l’émetteur ou en l’absence d’émission, les actifs
inscrits en registres distribués sont régis par :
a) la loi dont relève le conservateur ou
b) en l’absence de conservateur, la loi de l’Etat dans lequel le détenteur a sa résidence habituelle.

178V. supra, 3.2.1, iii).


179L’état de la jurisprudence s’appuie sur l’analyse de Andrew Dickinson, ‘Cryptocurrencies and the Conflict of Laws’ in Fox and Green,
Cryptocurrencies in Public and Private Law (OUP 2019) at para 5.08. En par+culier, l’opinion de Falk J, in Tulip Trading Ltd v Bitcoin
Associa+on for BSV [2022] EWHC 667 (Ch) (Tulip Trading) observant que l’analyse du Professeur Dickinson n’est pas fondée sur le
domicile mais sur le “the country where the par+cipant resides or carries on business at the relevant +me”.
40
Une majorité des membres du groupe a été favorable à l’énoncé d’une proposi1on, érigeant en
premier critère la loi du conservateur et, en second, celle de l’émeXeur. CeXe posi1on a en
par1culier été soutenue dans une perspec1ve opéra1onnelle, compte tenu de l’importance
quan1ta1ve de l’ac1vité des conservateurs en volume de négocia1on, dans la mesure où, en
pra1que, ce seront généralement les mêmes établissements qui proposeront des services de
conserva1on sur 1tres financiers numériques et crypto-ac1fs. Par ailleurs, ceXe approche a semblé
cohérente avec des perspec1ves de réforme en cours de discussion sur le terrain substan1el,
soumeXant à un régime par1culier de transfert de propriété les crypto-ac1fs conservés par un
conservateur régulé au sens du règlement MiCA180.
La posi1on ainsi dégagée repose sur l’opportunité très forte de la solu1on par analogie avec le droit
des 1tres financiers, en termes de prévisibilité. Le choix d’un raXachement de principe fondé sur la
loi du conservateur conduit opportunément dans un contexte na1onal et européen à faire coïncider
la détermina1on des effets patrimoniaux avec l’iden1fica1on du conservateur et assure ainsi, dans
le contexte du règlement MiCA, une coïncidence du traitement des ques1ons de droit privé avec la
loi applicable à un professionnel soumis à un statut réglementé.

Proposition n° 3 : il est proposé d’introduire une règle de conflit – sous réserve des qualifications
retenues en fonction des choix opérés sur le terrain substantiel – sur le modèle suivant :
1° Les conditions et effets patrimoniaux des actifs inscrits en registres distribués sont régis par la
loi dont relève le conservateur.
2° En l’absence de conservateur, les actifs sont régis par :
a) la loi l’émetteur ou
b) si celle-ci ne peut être déterminée ou à défaut d’émission, la loi de l’Etat dans lequel le détenteur
a sa résidence habituelle.

3.3. Portée du raHachement :

L’édic1on d’une règle de conflit spécifique conduit à préciser la portée du raXachement en termes
d’ar1cula1on avec la loi applicable au rapport de conserva1on (3.3.1) et d’inclusion dans son
périmètre des condi1ons de cons1tu1on et d’opposabilité des sûretés (3.3.2.). Le cas plus par1culier
des stablecoins invite également à la prise en compte générale des règles d’ordre public monétaire
posées par chaque Etat en rela1on à sa propre monnaie (3.3.3).

180 V. supra, les solu+ons évoquées sur le transfert de propriété, 3.1.3. i, 2° et, en par+culier, le rapport sur le règlement MiCA déjà cité,

qui envisage en effet de créer un régime juridique ad hoc pour le transfert de propriété des crypto-ac+fs en soumenant ceux-ci à un
régime proche de celui existant en ma+ère de +tres financiers, dis+nguant selon que les crypto-ac+fs sont ou non intermédiés par un
conservateur régulé, le registre per+nent, qui serait soit le registre de posi+on tel que prévu dans le Règlement MiCA, soit la DLT elle-
même pour les crypto-ac+fs non intermédiés.
41
3.3.1. ArUculaUon avec la loi applicable au rapport de conservaUon.
La détermina1on de la loi applicable aux effets patrimoniaux demeure en principe sans incidence à
l’égard de la rela1on contractuelle entre le conservateur et son client 181 comme des obliga1ons
statutaires qui pèsent sur le conservateur.
Une difficulté peut cependant être envisagée par analogie avec le droit des 1tres inscrits en compte.
La loi applicable au 1tre est suscep1ble d’affecter l’obliga1on de res1tu1on qui pèse sur le teneur
de compte pour les 1tres financiers soumis à un droit étranger, en cas de faillite du dépositaire
central, ou de la banque sous-conservateur local, lorsque les 1tres y sont localisés. La responsabilité
du TCC est en principe invariante en cas d’externalisa1on, selon l’ar1cle 322-35 RG AMF. Il existe
toutefois un tempérament apporté par son alinéa 3 en cas de conserva1on des 1tres émis sur le
fondement d’un droit étranger182.
La ques1on se pose de savoir s’il est opportun d’envisager une semblable adapta1on du régime de
responsabilité des conservateurs d’ac1fs autres que les 1tres financiers en cas d’externalisa1on
auprès d’un sous-conservateur183, compte tenu de la différence d’objet des obliga1ons pesant sur
les conservateurs pour le compte de 1ers et les teneurs de comptes-conservateurs. Pour les
premiers, l’obliga1on pesant sur les conservateurs porte alterna1vement sur les ac1fs ou sur les
moyens d’accès à ceux-ci184.

3.3.2. La quesUon de la consUtuUon et de l’opposabilité des sûretés.


L’inclusion de la cons1tu1on et de l’opposabilité des sûretés sur crypto-ac1fs dans une règle de
conflit dont le critère serait la loi du conservateur ou de l’émeXeur appelle un examen par1culier. La
simplifica1on induite par un raXachement unique peut paraître souhaitable mais la soumission des
sûretés à une règle iden1que à celle déterminant les effets patrimoniaux n’est pas, au plan des
principes, une nécessité185.
La dissocia1on des deux ques1ons paraît dépendre de choix de droit substan1el en même temps
que de modalités techniques de cons1tu1on de la sûreté186.

181 Comp. selon les principes Unidroit, le rapport de conserva+on est soumis à la loi d’autonomie telle que précisée dans le contrat de

conserva+on lui-même pour l’ensemble des ques+ons régies par les principes 10 à 13 (principe 5(3)). Sont ainsi concernées :
l’iden+fica+on des ac+vités de conserva+on (Principe 10) ; la détermina+on des obliga+ons du conservateur envers son client (Principe
11) ; la protec+on du client de bonne foi contre toute ac+on en revendica+on émanant du conservateur (Principe 12) et le régime
applicable aux ac+ons des créanciers du conservateur en cas d’insolvabilité de celui-ci (Principe 13), déduisant les conséquences de la
ségréga+on des ac+fs détenus par le conservateur du gage offert à ses propres créanciers.
182 Selon cene disposi+on, « Toutefois, lorsqu'un teneur de compte-conservateur conserve pour le compte d'un client professionnel des

+tres financiers émis sur le fondement d'un droit étranger, il peut convenir d'une clause totalement ou par+ellement exonératoire de
sa responsabilité avec ce client professionnel ».
183 Selon l’ar+cle 722-2, alinéa 2, RG AMF : « La responsabilité du conservateur d'ac+fs numériques vis-à-vis de son client n'est pas

affectée par le fait qu'il recoure à un +ers ».


184 V. art. 722-1, 6° RG AMF. V. RAPPORT SUR LE RÈGLEMENT MiCA, préc., p. 30.
185 Comp. les Principes Unidroit, qui soustraient à la détermina+on de la loi applicable selon la loi d’autonomie deux ques+ons (Principe

5(4)) : celle de l’opposabilité aux +ers d’une sûreté cons+tuée par une méthode alterna+ve à la transmission du contrôle et celle de la
priorité donnée au créancier muni d’une sûreté ainsi cons+tuée.
186 Le groupe de travail n’a pas jugé u+le d’inscrire dans ses travaux le cas par+culier des contrats de garan+e financière, qui appelle

une réflexion spécifique compte tenu de la source européenne du disposi+f en la ma+ère. Le problème de détermina+on de la loi
applicable suppose comme préalable l’extension du disposi+f aux crypto-ac+fs, selon l’alterna+ve indiquée dans un précédent rapport
(intégra+on des transac+ons sur crypto-ac+fs dans le champ des obliga+ons financières et/ou intégra+on des crypto-ac+fs dans le
champ des ac+fs éligibles). Ce choix ayant voca+on à être réalisé au niveau des ins+tu+ons européennes, l’adapta+on du critère de
ranachement figurant dans la direc+ve collateral n’est pas encore une ques+on.
42
Le groupe de travail a ainsi considéré le travail réalisé en 2022 par l’European Law Ins1tute consacré
à l’u1lisa1on des « ac1fs numériques » (digital assets) comme objet d’une sûreté187. Il a observé
d’un point de vue méthodologique la per1nence de dis1nguer les raXachements déterminant la loi
applicable à la cons1tu1on de la sûreté et à son opposabilité aux 1ers. Selon une règle de conflit en
cascade, le principe 3 soumet en effet à 1tre de principe la cons1tu1on de la sûreté à la loi du centre
des intérêts (place of business), de l’administra1on centrale ou de la résidence principale du
cons1tuant (security provider), tempérée et ar1culée par différentes excep1ons.
Compte tenu de l’étendue de la ques1on et des problèmes pra1ques pouvant résulter de la diversité
de sûretés suscep1bles d’être cons1tuées, le groupe de travail a fait le choix de s’en tenir à un exposé
synthé1que des difficultés et pistes de solu1ons concevables, au regard des raXachements
principaux retenus dans la règle de conflit concernant les effets patrimoniaux des crypto-ac1fs
discutée plus haut.
Deux ques1ons ont ainsi été envisagées, concernant l’adéqua1on des critères proposés à la
cons1tu1on et à l’opposabilité des sûretés en général (i) et à l’hypothèse plus par1culière d’une
sûreté cons1tuée sans dépossession (ii).

i. Incidences des critères de raKachement applicables aux effets patrimoniaux


A l’examen, les critères de la loi de l’émeXeur et de la loi du conservateur peuvent être envisagés.
Une autre voie est toutefois concevable consistant à ar1culer en ma1ère de sûretés
conven1onnelles l’applica1on d’une règle matérielle de droit interna1onal privé, avec la loi choisie
par les par1es.
Lorsque les ac1fs se trouvent soumis à la loi de l’émeXeur, il a été d’abord observé qu’il pouvait
sembler difficile de cons1tuer une sûreté qui porterait indifféremment sur un ensemble indis1nct
de crypto-ac1fs soumis à la loi d’émeXeurs différents. La difficulté provient ainsi de l’iden1fica1on
de l’assieXe de la sûreté permeXant la soumission de sa cons1tu1on à une loi unique. En suivant le
projet d’adapta1on du nan1ssement de comptes de 1tres dans l’Union européenne188, discuté dans
un précédent rapport du HCJP, la sûreté ne peut être cons1tuée que d’après une loi unique,
nécessairement dis1ncte de celle applicable aux ac1fs considérés isolément.
La soumission de la garan1e à la loi applicable aux ac1vités du conservateur paraîtrait ainsi mieux
adaptée et plus per1nente en pra1que en raison de la comptabilité des crypto-ac1fs qu’il assure. Le
conservateur opère un registre de tenue de posi1on189. L’obliga1on de ségréga1on édictée par le
règlement MiCA190 assure suffisamment les condi1ons de maîtrise d’une évolu1on de l’assieXe de
la sûreté par la répar11on des opéra1ons enregistrées191.
Il a toutefois été observé ensuite que ceXe approche n’est pas une nécessité technique. L’extension
du nan1ssement de compte de 1tres financiers au nan1ssement de 1tres financiers repose sur la
possibilité de délimiter l’assieXe de la sûreté à certains 1tres en par1culier192. A cet égard, par

187 ELI Principles on the Use of Digital Assets as Security - Report of the European Law Ins+tute, 2022.
188 Rapport sur le nan+ssement de +tres financiers dans l’Union européenne, préc.
189 En pra+que, la tenue du registre peut être réalisée grâce à des cold wallets qui sont rarement individualisés par client mais au

moins individualisés dans un compte omnibus pour l’ensemble des clients d’un conservateur.
190 Ar+cle 75§7.
191 Selon une répar++on dans les cold wallets, éventuellement individualisés, des opéra+ons enregistrées sur les hot wallets, connectés.
192 L.211-20, II, al. 2, Code monétaire et financier.

43
analogie avec le droit des 1tres, le récent rapport déjà cité rela1f au règlement MiCA envisage des
possibilités d’adapta1on du droit du nan1ssement aux crypto-ac1fs par1culiers193. Ainsi,
techniquement, un crypto-ac1f peut-être spécifiquement désigné comme objet d’une sûreté réelle,
rendant ainsi possible de soumeXre à une loi unique ses effets patrimoniaux et les sûretés dont il
pourrait faire l’objet isolément.
La soumission à la loi de l’émeXeur n’en recèle pas moins une faiblesse addi1onnelle en ce qu’elle
est logiquement insuscep1ble de régir des crypto-ac1fs non émis.
Compte tenu de la dimension technique forte des modalités d’exercice de ses droits reconnus aux
créanciers dans le contexte DLT, le rôle de la liberté contractuelle ne saurait être méconnu, tant aux
fins de détermina1on de l’assieXe de la sûreté dans le cas d’une fork que du droit de réten1on
consen1 au créancier nan1 ou encore de réalisa1on de la sûreté194. Au fond, l’enjeu véritable de la
détermina1on de la loi applicable ne 1ent ainsi pas tant à l’applica1on d’un régime détaillé – en
par1culier compte tenu de l’interven1on perturbatrice du droit des procédures collec1ves – qu’à la
détermina1on d’un formalisme par1culier de cons1tu1on et d’opposabilité aux 1ers.
Ainsi comprise, la détermina1on de la loi applicable n’appelle pas nécessairement l’iden1fica1on
d’un raXachement objec1f, en dis1nguant les rela1ons entre le cons1tuant et le créancier et
l’opposabilité de la sûreté à l’égard des 1ers.
La cons1tu1on de la sûreté pourrait relever de la reconnaissance d’un espace étendu à la loi
d’autonomie195. L’opposabilité aux 1ers pourrait alors prendre la forme d’une règle matérielle limitée
à la seule indica1on d’un formalisme minimal196.
On peut ainsi évoquer à 1tre d’analogie avec la dépossession assurant l’opposabilité du gage le
critère du contrôle197. Le contenu de la règle à établir suppose, en ce sens, d’iden1fier le formalisme
d’opposabilité per1nent qui procède d’une analyse de droit substan1el.

ii. La ques)on de la cons)tu)on de sûretés en cas de déten)on directe

Le groupe de travail s’est interrogé de lege ferenda sur l’hypothèse d’une sûreté conven1onnelle
sans dépossession, reposant sur une obliga1on souscrite par le cons1tuant de maintenir l’assieXe
de la sûreté au profit du bénéficiaire. L’interroga1on procède de l’iden1fica1on de la loi applicable
à une sûreté cons1tuée sans dépossession, faisant reposer garde et conserva1on des crypto-ac1fs
sur le cons1tuant.

193 RAPPORT SUR LE RÈGLEMENT MiCA, préc., pp. 35-37, spéc., p. 37.
194 V. les proposi+ons d’adapta+on aux crypto-ac+fs du régime du nan+ssement RAPPORT SUR LE RÈGLEMENT MiCA, préc., pp. 35-37.
195 Même admise, la loi d’autonomie trouvera par exemple a minima à s’ar+culer avec la loi applicable aux procédures d’insolvabilité

pour l’iden+fica+on du rang des créanciers : v. en ce sens, le Principe 5(7) a) des Principes Unidroit.
196 Par analogie avec celle introduite par la Loi de sécurité Financière du 1er août 2003 à l’ar+cle L.313-27, en ma+ère de cession ou de

nan+ssement de créances professionnelles « La cession ou le nan+ssement prend effet entre les par+es et devient opposable aux +ers
à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances,
sans qu'il soit besoin d'autre formalité, et ce quelle que soit la loi applicable aux créances et la loi du pays de résidence des débiteurs ».
197 Comp., l’actuel ar+cle 7, V. de la Proposi+on de loi précitée n° 2623, disposant, sur le terrain substan+el que « Le transfert ou le

nan+ssement des droits conférés par le +tre transférable électronique par l’endossement ou par la simple remise de ce +tre s’opère
par le transfert du contrôle exclusif exercé sur ce +tre ».
44
Plusieurs membres du groupe de travail ont émis des doutes sur la per1nence de l’hypothèse, en
par1culier compte tenu de l’impossibilité pra1que dans laquelle se trouverait le bénéficiaire de
pouvoir efficacement réaliser la sûreté198.
D’autres ont observé l’absence d’obstacle théorique et les possibilités d’aménagement techniques
permeXant d’établir les diligences effectuées par le cons1tuant en termes de garde des crypto-ac1fs
remis en garan1e. Il a en outre été souligné que le bénéfice d’une sûreté ainsi cons1tuée peut
résulter pour le créancier de la priorité qui lui est ainsi conférée sur les autres et du rang qui peut lui
être aXribué en cas de soumission du cons1tuant à une procédure d’insolvabilité.
Ainsi, dans l’hypothèse d’une sûreté cons1tuée sans dépossession, il est logiquement impossible de
s’appuyer sur la loi du conservateur. La jus1fica1on d’une applica1on de la loi de l’émeXeur peut
demeurer mais est à nouveau inadaptée aux ac1fs ne résultant pas d’une émission.
A défaut de pouvoir s’appuyer sur l’un des critères objec1fs disponibles pour déterminer les autres
effets patrimoniaux, l’applica1on de la loi d’autonomie199 se présente comme une alterna1ve
envisageable. On peut renouveler l’observa1on que la principale limite à la liberté contractuelle
devrait tenir en la ma1ère à la protec1on des 1ers. Les créanciers du cons1tuant doivent disposer
d’éléments objec1fs permeXant de déterminer dans quelles condi1ons et propor1ons les biens du
cons1tuant sont grevés de sûretés.
La solu1on pourrait alors procéder, ainsi qu’il a été men1onné au sujet du nan1ssement, d’une règle
matérielle limitée à la seule indica1on d’un formalisme minimal d’opposabilité – nécessairement
dis1nct de la seule possession –, en complément de la soumission de la sûreté à la loi d’autonomie.
Il demeure en toute hypothèse possible de raisonner par évic1on de la loi applicable a posteriori, en
examinant les préroga1ves conférées par la sûreté au regard de l’ordre public en la ma1ère200.

3.3.3. Les règles d’ordre public monétaire pour les stablecoins.


Si elles sont étrangères à la catégorie des effets patrimoniaux telle qu’elle a été entendue jusqu’ici,
les règles d’ordre public posées par les Etats rela1ves à leur monnaie viennent nécessairement
s’ar1culer avec la loi applicable à un ac1f dont la valeur de référence serait cons1tuée par une
monnaie d’un Etat ou plusieurs Etats.
Le groupe de travail a observé que le ques1onnement a un enjeu pra1que au sein de l’Union
européenne du fait du régime par1culier de l’émission de jetons de monnaies électroniques, établi
par le règlement MiCA201, compte tenu de l’obliga1on faite aux autorités compétentes d’informer la

198 Comp. sur ce point, observant l’impossibilité pra+que de réalisa+on d’une saisie à défaut de conservateur opérant comme
intermédiaire habilité en applica+on du régime des saisies de droits incorporels autres que les créances de sommes d’argent : RAPPORT
SUR LE RÈGLEMENT MiCA, préc., p. 28-29.
199 Selon le Principe 5(5), les Principes Unidroit soustraient à l’applica+on de la loi désignée dans l’ac+f l’opposabilité des sûretés

cons+tuées autrement que par un changement du « contrôle » et le rang des créanciers munis de sûretés.
200
On se réfère ici à une jurisprudence traditionnelle en matière de gage automobile dont le raisonnement fondé
sur l’ordre public demeure et paraît susceptible d’être étendu à des biens incorporels, quoique la solution soit
désormais abandonnée en conséquence de l’admission en droit français de la validité du pacte commissoire :
Cass. 1re, civ., 8 juill. 1969, Bull. civ. I, n° 268, Soc. DIAC.
201
Il découle d’ailleurs du règlement lui-même une règle particulière venant limiter le contenu des droits
représentés par les jetons de monnaie électronique avec l’interdiction du versement d’intérêts faites à l’émetteur
par l’article 50.
45
banque centrale de l’Etat dont une devise autre que l’euro serait u1lisée comme référence pour un
jeton d’importance significa1ve.
***

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Annexe I : Composi6on du groupe de travail

Présidents
Jérôme Chacornac, Maître de conférences à l’Université Paris-Panthéon-Assas
Hubert de Vauplane, Avocat, Cabinet Kramer Levin Na•alis & Frankel LLP

Membres du Groupe de travail


Thiebald Cremers, Directeur Affaires Juridiques, AMAFI - Associa1on française des marchés
financiers
France Drummond, Professeur de droit privé à l’Université Paris-Panthéon-Assas
Julien Goldzlagier, Chargé de mission sur les ac1fs numériques, Direc1on des affaires civiles et du
Sceau
Philippe Goutay, Partner - Avocat au Barreau de Paris, Jones Day
Maxime Julienne, Professeur de droit privé à l’Université Paris-Saclay
Caroline Kleiner, Professeure de droit privé à l’Université Paris Cité
Francesco Martucci, Professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas
Aurélien Parent, Direc1on des Affaires Juridiques, Autorité des marchés financiers (AMF)
Arnaud Reygrobellet, Professeur de droit privé à l’Université Paris X-Nanterre
Clément Saudo, Direc1on des Affaires Juridiques, Autorité des marchés financiers (AMF),
Secrétaire du groupe
Chloé Ahnine, Elève-avocat

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