L Horreur Economique

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Notes de lecture

L’HORREUR ECONOMIQUE travail. Sur un ton neuf, Viviane Forrester tire


la sonnette d’alarme afin de réveiller les
Viviane Forrester “consciences”: au lieu de lutter contre le
Editions Fayard. 1996, 215 p, 98 francs. chômage en généralisant notamment le
“sous-intérim permanent”, proposons de
Sous forme de réquisitoire décapant, nouvelles voies pour s’organiser “à partir de
l’auteur s’attache à démontrer la situation l’absence de travail”.
contradictoire dans laquelle se trouvent nos La fin du travail, mythe ou réalité: le
sociétés modernes et les dangers qui les débat est désormais ouvert.
guettent. (Valérie Pérot)
Dans une économie mondialisée, le tra-
vail humain est de moins en moins néces-
saire à la création des richesses et du profit,
dit V. Forrester. La fin de l’ère industrielle et
de la production de biens matériels engen-
dre une nouvelle civilisation dans laquelle un L’IMPÉRATIF DE SOLIDARITÉ
faible pourcentage de la population aura des LA FRANCE FACE À LA MONDIALISATION
fonctions productives. Conduites par la seule
logique de l’économie spéculative, nos so- Anton Brender
ciétés excluent massivement les individus Editions La Découverte. 1996,
non rentables et inutiles. 149 pages, 85 francs.
La nouvelle norme de cette civilisation
en marche sera l’absence de travail.
Grève de décembre 1995, le défi qui se
Paradoxalement, les politiques mises en
pose à une France européenne campant sur
œuvre tentent de maintenir artificiellement
ses vieilles certitudes apparaît avec toute
une société toujours fondée sur le travail
l’acuité qu’il mérite.
alors qu’il disparaît: il s’agit d’un véritable
De style vivant et de lecture plaisante,
leurre aux conséquences dramatiques pour
cet essai socio-économique large et ouvert
les individus. Le maintien à tout prix d’un
ne verse cependant jamais dans la facilité: il
modèle de société périmé génère l’exclusion
apporte, de manière solitaire, de solides ar-
massive des “inutiles” et des “non renta-
guments aux tenants du principe par lequel
bles”: les exclus du modèle obsolète seront
la réponse à la problématique actuelle se
bientôt plus nombreux que les inclus. Une
doit, avant tout, d’être collective, non pas par
telle aberration doit nous faire réfléchir, pen-
adhésion à de désuets concepts idéologi-
dant qu’il en est encore temps, sur le sens et
ques mais par conviction d’une logique tant
la finalité que l’on veut donner à notre société
humaniste que réaliste.
de demain. Quelle sera la place de l’homme
Ainsi, Anton Brender défend-il avec force
dans la société à venir ?
illustrations le rôle d’un Etat redéployé et des
Pour la première fois de notre histoire, dit
pouvoirs publics dans la «domestication»
l'auter, le travail humain n’est plus néces-
d’un libéralisme qui se laisserait facilement
saire. Toutes nos références, notre culture,
aller vers des situations excessives qui,
notre histoire se désagrègent. Les hommes
d’ailleurs ne lui profiteraient qu’à court terme.
vivent un nouveau drame de l’Histoire: hier
Certes, toutes les idées ne sont pas
aliénés et exploités, aujourd’hui exclus et
inédites mais l’ouvrage, argumenté d’exem-
errants, les hommes découvrent qu’il y a pire
ples concrets et récents, apporte un crédit
que l’exploitation: ne plus être exploitables,
certain à un discours original que nous sou-
c’est-à-dire n’avoir aucune valeur. A quand
haiterions plus répandu, surtout en ces temps
la disparition de l’homme ?
de forte poussée de la «pensée unique».
Si l’on ne peut qu’approuver l’indignation
2 de l’auteur, “l’horreur économique” est un
(Stéphane Chapin)
livre de plus sur la fin du travail (sujet très à
la mode) et une critique acerbe des politi-
ques de l‘emploi au nom du sauvetage du

CADRES CFDT N° 375-376, DÉCEMBRE 1996-JANVIER 1997

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